mercredi 5 septembre 2018

CE QUE JE PENSE DE LA POLITIQUE NATIONALE ET INTERNATINALE POUR LE DEVELOPPEMENT EN AFRIQUE


De 1998 à 2010, j’ai dirigé des organisations paysannes aux niveaux national et international. J’étais en contact avec des partenaires d’un niveau élevé car il fallait à chaque fois faire remonter les préoccupations des producteurs en lien avec les maillons production, transformation, commercialisation et le développement des chaînes de valeur des produits agricoles en général. Aujourd’hui je me rends compte que certains sujets que j’avais soulevés sans bien les comprendre sont des vrais sujets à débat. Suite à une rencontre de nos revendications contre les subventions américaines et européennes sur le coton, préoccupation soulevée par les producteurs de coton africains, les gouvernements africains, aidés par les ONG, ensemble ont amené le sujet à l’OMC à Cancún et à Hong-Kong. Par ailleurs, nos tenues traditionnelles et nos bourses que nous avions portées à Hong Kong, avaient pour but de rappeler à nos hommes politiques, les richesses culturelles dont regorgent nos pays et la nécessité de les valoriser car il nous faut absolument des politiques autour de la transformation et de la consommation des produits locaux. Il s’agissait également de faire comprendre cela aux institutions comme la Banque Mondiale, la FMI, ...
Même si nous n’avons pas eu gain de cause contre les subventions, cela a été une occasion pour nos gouvernements de comprendre la nécessité de leur cohésion sur des sujets concrets pour le développement de leurs peuples ; cette action de porte-parole des peuples dans les instances supranationale et internationale constitue une de leurs principales missions. C’est pendant ces années de débat sur les systèmes injustes dans le domaine du commerce des produits agricoles comme le coton, qu’il m’est arrivé un jour de faire la réflexion suivante : « notre coton est vendu en dollars et l’argent doit passer par l’euro pour revenir en F CFA ; dans cette transaction monétaire, qui est le gagnant ? ». Des économistes africains ont tenté de répondre à ma question dans plusieurs conférences par-ci et par-là. Ce qui ressortait de ces débats était que le franc CFA était une chasse gardée de la France sur ses anciennes colonies et aujourd’hui je me rends compte que la majorité des gouvernements concernés ont pris cela comme préoccupation, un problème à résoudre. C’est au fur et à mesure que je suis éclairé et je comprends que ce n’est pas un petit sujet.
Lors d’une de mes missions au Cameroun, invité par une ONG pour des revendications concernant le développement de la population africaine, nous devrions marcher à Yaoundé, la marche a été empêchée et nous n’avons pu faire que des interventions avec la foule qui était présente. S’en est suivie dans l’après-midi une conférence. Une des questions qui m’ont été posées par les journalistes est la suivante : « Monsieur TRAORE, nous vous entendons sur les médias africains et occidentaux, fustigeant les américains et les européens parce qu’ils subventionnent leur coton au profit de leurs producteurs de coton à votre détriment car contraire aux règles de l’OMC, n’est-ce pas plutôt aux gouvernements africains de soutenir également leurs producteurs ? ». Ma réponse a été que mon constat par rapport aux dirigeants africains était qu’ils n’étaient pas toujours élus clairement par leurs peuples. En général, si quelqu’un voulait être dirigeant, il partait chercher l’accord des pays européens et des Occidentaux et si eux ils étaient pour lui, les élections en Afrique n’étaient que des formalités. Que le candidat approuvé par ces puissances ait eu la majorité ou pas, il y a toujours une méthode pour qu’il soit Président. Le candidat élu savait alors d’où il détenait sa légitimité et ne travaillait donc plus pour son peuple. La misère de ce peuple ne pourrait pas l’empêcher d’aller faire ses vacances en Occident ou en Europe.



La conclusion que je tire après plusieurs années d’interpellation sur ces sujets, est que quand on dirige, que ce soit dans les structures professionnelles et administratives, au niveau national et international, dire la vérité à un partenaire n’est pas un crime. Il suffit tout simplement que la vérité soit la vraie préoccupation de la masse. Je considère plutôt cela comme un début de solution. C’est à partir de là que se crée un partenariat gagnant-gagnant. Les peuples africains et un certain nombre de dirigeants ont compris que la légitimité d’un dirigeant ne peut être que national pour espérer le développement endogène. Cela n’empêchera pas un bon partenariat entre nos anciens partenaires et des potentiels nouveaux. C’est pourquoi je me réjouis aujourd’hui du partenariat qui s’agrandit entre la Chine, la Russie et l’Afrique. En rappel, ici au Burkina Faso, sans bien comprendre, il m’est arrivé de poser la question à l’époque de savoir pourquoi il n’y avait pas de partenariat entre le Burkina et la Chine populaire alors que c’est un grand consommateur de notre coton et leurs produits manufacturés sont partout au Burkina. Aujourd’hui, c’est chose faite. C’est le moment d’une bonne cohésion au sein de la population. Arrêtons les querelles intestinales, créons un vrai dialogue entre la population africaine et les dirigeants et le soleil de l’Afrique va aussi briller.

En tant qu’observateur politique
Ouagadougou, le 05 Septembre  2018
TRAORE B. François,
Agriculteur Burkinabé
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
           













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