dimanche 14 février 2016

Ce que je pense de l’atelier organisé par l’UGCPA pour son adaptation à l’acte uniforme OHADA relatif au Droit des sociétés coopératives

Du 08 au 13 février 2016, l’Union des Groupements pour la Commercialisation des produits Agricoles (UGCPA) de la Boucle du Mouhoun a organisé à Moundasso (Dédougou) un atelier à laquelle j’ai été invité comme personne ressource. Le but de l’atelier était de réfléchir sur l’adaptation de l’UGCPA à la loi OHADA sur les sociétés coopératives. En effet, cela fait plus d’un an que l’UGCPA a entamé ce travail. Elle a fait appel au service d’un consultant qui a fait le tour de l’organisation de la base au sommet. À l’issue de cet état des lieux, le consultant a fait une proposition par rapport à la restructuration et aux activités menées par l’UGCPA. Ce sont ces résultats qu’une cinquantaine de producteurs membres de la structure se sont regroupés pour réfléchir à l’appropriation. L’UGCPA a également fait appel à un de leurs partenaires canadiens de l’UPA DI, comme modérateur et facilitateur. En rappel l’UGCPA est une structure qui fait l’approvisionnement en instants et la commercialisation des excédents céréaliers (le maïs, le sorgho, le petit mil, le niébé et les fleurs de bissap) de ses membres. L’activité regroupe des producteurs, hommes, femmes, jeunes accompagnés par quelques techniciens. De nos jours l’UGCPA commercialise plus de deux mille (2 000) tonnes de céréales. Elle totalise 23 ans de vie professionnelle.

À la fin de l’atelier, après beaucoup de débats démocratiques sur la vie de l’organisation, en entendant que l’Assemblée se prononce là-dessus, l’orientation pris par l’atelier est d’avoir deux échelons de structures. A la base, le producteur adhère à une coopérative simplifiée en libérant une part sociale. Ce sont ces coopératives simplifiées qui devront se mettre ensemble pour créer la coopérative avec conseil d’administration au niveau régional. Selon l’interprétation du consultant, il faut minimum quinze (15) coopératives simplifiées pour créer une coopérative avec conseil d’administration.  À cet atelier, l’accent a été mis sur la bonne gouvernance en commencent par la tenue stricte des assemblées générales ; sur  l’alternance ; le développement du membership et du leadership ; la transparence dans la gestion financière  et sur l’augmentation de la quantité des produits commercialisés dans le respect strict des engagements de chacun des producteurs membres. L’UGCPA est une structure dans laquelle il ne peut pas avoir des membres fictifs. Tous ses membres sont engagés dans l’économie. En outre, l’atelier a aussi recommandé de l’accompagnement pour la formation des membres qui vont créer ces structures car l’UGCPA veut mettre la barre haute en ayant comme objectif des coopératives qui mettent collectivement sur le marché plus du tiers (1/3) de la production vivrière de la boucle du Mouhoun. En tant que grenier du Burkina, la boucle du Mouhoun produit plus de 700 000 tonnes de céréales par an. L’UGCPA a l’assurance que cette synergie est faisable car plusieurs de ses membres ont fait des missions au Canada où presque toutes les filières sont organisées dans des coopératives et cela a fait du Canada une puissance agricole dans le monde.

À mon avis, l’UGCPA est sur la bonne voie. Depuis 2012, dix-sept pays africains se sont engagés à appliquer l’acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives. Cela pour une homogénéité des organisations paysannes dans ces dix-sept pays. Chose qui peut permettre et faciliter les échanges d’expériences entre coopératives ; permettre que les produits agricoles de ces dix-sept pays soient commercialisés partout où le besoins se trouve. Le Burkina Faso est un grand pays agricole. Des associations et des organisations multiples existent mais rares sont celles qui sont engagées à aider le producteur dans l’approvisionnement en intrants, en équipement agricole et la commercialisation de ses produits malgré dix-huit (18) Journées Nationales du Paysans et plus de quinze (15) ans de l’existence de la loi 014. Nous avons même des paysans qui sont des professionnels des ateliers ; les ateliers sont devenus leur production. Cette réalité doit changer. Les structures comme celles du coton et des semenciers sont permanemment en palabre souvent à cause d’une mauvaise gestion et ou d’une mauvaise collaboration. Chacune de ces deux structures a des dossiers en justice. Voilà trois mois que le Président de l’Union Nationale des Producteurs de Coton (UNPCB) est en prison. Cela fait plus d’un an que des producteurs membres de l’UNPCB ont exposé sur l’internet la malversation dans cette structure. Dans un contexte socio-politique où les slogans sont « plus rien ne sera comme avant », « tolérance zéro », la mauvaise gestion des organisations paysannes ne doit pas être encouragée.

 Je me rappelle que dans les années 90, les groupements villageois dans la zone cotonnière ont été surendettés du fait de la mauvaise gestion de leurs dirigeants et cette mauvaise gestion était soutenue par des techniciens accompagnateurs qui y trouvaient leur compte. Les dirigeants de ces groupements étaient devenus des hommes intouchables car amis de toutes les autorités. C’est eux qui pouvaient payer à boire et c’est eux qui partageaient sans raison de l’argent à leur accompagnateur. Résultat : la production cotonnière est tombée  de 180 000 à 116 000 tonnes. Il a fallu une restructuration rigoureuse en mettant de côté ces brebis galeuses. Voilà qu’à la campagne 2003-2004, nous sommes devenus premier pays producteur de coton en Afrique avec 730 000 tonnes. En plus de ce qui précède, dans la multiplication de la semence améliorée (maïs, mil, sorgho, niébé, …), on trouve des graines qui ne sont pas de la semence améliorée. Cela est un crime car l’Etat burkinabé dépense beaucoup d’argent sur cette semence pour donner de n’importe quoi aux producteurs. Il y’a de cela plusieurs années que je ne veux plus ces semences offertes par l’Etat aux producteurs car plus de la moitié n’est pas de la semence améliorée. Là, nous savons qu’il y’a également la complicité des accompagnateurs ; plusieurs de ces accompagnateurs étaient eux même semenciers. Mon père avait l’habitude de me dire que si je fais quelque chose qui n’est pas bien en le cachant aux autres, ce qui est sûr, je ne le cache pas à moi-même car moi-même je sais que ce n’est pas bien et c’est pourquoi je le cache. Dans ce sens, je me trompe moi-même car ça va me rattraper tôt ou tard. Je sais pertinemment qu’avec la volonté politique, on peut relever tous les défis car les Rwandais, après le génocide, se sont mis sur la voie du développement. Aujourd’hui on peut tout reprocher aux Rwandais mais quand tu te rends Rwanda, tu sens la différence entre ce pays et les autres pays en matière d’avancement dans le développement. Je pense que le Burkina peut faire la même chose.

En tant que président d’honneur du syndicat des agriculteurs du Burkina (SYNA-B)

Ouagadougou, le 14 février  2016

TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr  
 (+226) 70 95 34 45
 (+226) 78 50 16 25

 BURKINA FASO

jeudi 4 février 2016

Ce que je pense de l’avenir des jeunes après la révolution

La population du Burkina Faso est à plus de 60% jeune ; près de la moitié de cette jeunesse n’a pas eu la chance d’aller à l’école. Ceux qui ont pu aller à l’école ont été souvent mal formés, et ceux qui sont bien formés ont des difficultés à avoir du travail. Certains se trouvent dans l’obligation de se marier, de créer un foyer sans revenu sûr. Malgré toutes ces difficultés, cette jeunesse demeure combative mais souvent sans espoir. C’est ainsi qu’une bonne partie de la jeunesse du milieu rural vient gonfler le nombre de celle de la ville. Les sites d’orpaillage  sont envahis par ces jeunes filles et garçons, en abandonnant l’école. Cette situation et le courage les obligent à traverser les frontières en comptant sur leur capacité de travail. Quelques-uns parmi eux réussissent et d’autres y périssent. C’est dans ce contexte qu’il y a eu l’insurrection de 2014. Ce mouvement populaire, nous pouvons le comparer à la révolution française ; quand le peuple français voulait la liberté, la démocratie et le développement pour toute sa population.

La France a réussi sa révolution et cela a fait d’elle une puissance économique. La jeunesse Burkinabé s’est trouvée dans une situation l’obligeant à se révolter. L’objectif étant la liberté d’entreprendre et l’égalité des chances en ayant un régime démocratiquement élu. La jeunesse et la population Burkinabé ont réussi les différentes étapes en réussissant sa révolution et en réussissant les élections présidentielle et législative. Dans une mondialisation où on prône la démocratie et la liberté, mon souhait est que tous les pays épris de paix, de liberté, de justice et de démocratie collaborent avec notre gouvernement afin qu’il puisse travailler librement pour satisfaire la jeunesse et la population burkinabé en général. La jeunesse attend qu’on lui facilite l’obtention du boulot, qu’on l’aide à satisfaire les besoins primordiaux de la famille car chez nous, on réussit la retraite par la réussite de la jeunesse. J’ai 64 ans ; j’ai de grands enfants, jeunes filles et garçons qui n’ont pas peur de travailler. Ils ont tout simplement besoin d’être accompagnés par une administration responsable qui leur facilite la tâche. Et toutes les familles du Burkina sont comme la mienne. Je souhaite donc que les Burkinabé gardent leur cohésion, une cohésion qui permet de mettre nos partenaires en confiance. Que Dieu nous donne la paix et accompagne cette cohésion.

En tant que Président d’honneur du Syndicat des Agriculteurs du Burkina (SYNA-B)

Ouagadougou, le 04 février  2016

TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr  
 (+226) 70 95 34 45
 (+226) 78 50 16 25

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