lundi 20 novembre 2017

CE QUE JE PENSE DE L’ATELIER ORGANISE PAR KONRAD ADENAUER SUR LA BONNE GOUVERNANCE ET LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE



J’ai participé le mercredi 08 Novembre 2017, au nom de mon parti politique, le Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP), à un atelier organisé par la coordination de la fondation Konrad Adenauer Stiftung dans le cadre de la mise en œuvre du projet « Un seul monde sans faim ». Ont participé à cette réflexion, les représentants de partis politiques, d’associations et des professionnels du monde rural. Les sujets discutés étaient la sécurité alimentaire et la bonne gouvernance. En tant qu’agriculteur, je me contente de relater ce que j’ai pu retenir et de donner mon avis personnel comme j’ai l’habitude de le faire ; ce qui n’est pas à confondre avec le rapport final de l’atelier.
Dans l’histoire de l’Agriculture, c’est pour se sécuriser que l’homme a prélevé et entretenu des plantes provenant de la nature créant ainsi l’Agriculture (volet production végétale). Et quand il a récolté, il a stocké et entretenu cette récolte. Cela lui a permis d’éviter de se lever chaque jour comme un animal et aller chercher à manger. C’est de cette manière que l’homme a pu se sédentariser avec ses proches pour créer des villages et c’est dans la même procédure que l’élevage a vu le jour. Dans notre cas au Burkina Faso, l’outil de stockage des récoltes était le grainier qu’on pouvait apercevoir autour de toutes les maisons ou à l’intérieur. Ce grainier pouvait contenir la ration annuelle de l’exploitation familiale. Les plus prudents qui avaient bien récolté pouvaient avoir plus et faisaient des réserves pour d’éventuelles mauvaises campagnes agricoles. Ce fait veut dire donc dire que nos ancêtres savaient bien ce que signifie « sécurité alimentaire ». Ils ont pu aussi créer des échanges qui se faisaient dans les marchés hebdomadaires pour pouvoir écouler leurs excédents de productions en vendant à ceux qui étaient dans le besoin ; de cette manière, c’est toute la société qui était sécurisée dans un esprit de complémentarité.
Aujourd’hui, dans ce monde moderne, il n’y a donc pas de raison au fait que l’insécurité alimentaire continue à être un problème. Il est vrai que ce que nos ancêtres faisaient ne suffit plus car nous sommes plus nombreux qu’eux ; des grandes villes existent et doivent être ravitaillées. La pression s’est accentuée sur les terres et non seulement les terres se sont appauvries et cela a également créé des conflits. Ces conflits sont accentués par le fait que les animaux sédentarisés continuent à être nourris par la brousse malgré la pression foncière alors que c’est la promotion dans les faits de l’intégration et de la complémentarité entre production végétales et animales qui ont fait et font des grandes puissances agricoles dans le monde, ce qu’ils sont. C’est dans ce sens que les participants ont relevé un certain nombre de problèmes qui doivent être résolus pour qu’on ait cette sécurité alimentaire. Parmi ces problèmes, il y a celui de l’insécurité foncière, la difficulté d’accès à la terre pour les jeunes et les femmes, l’insuffisance de la modernisation du matériel agricole et l’inadaptation du système d’accompagnement à cette modernisation, l’organisation des acteurs pour faciliter l’appui-conseil et technique, l’approvisionnement et la commercialisation, l’obtention de la vraie semence améliorée par tous les producteurs car non seulement la semence améliorée distribuée de nos jours n’est pas suffisante, mais elle est souvent de qualité douteuse. Il y’a aussi le manque d’infrastructures de stockage un peu partout dans des conditions optimales pour préserver la qualité des produits récoltés. La question des infrastructures routière, est certes une question transversale à tous les secteurs d’activités, mais le désenclavement des zones agropastorales ne peut être occulté car il contribue fortement à la sécurité alimentaire (accessibilité des denrées alimentaires) via la circulation des récoltes des zones déficitaires ou qui n’en produisent pas, aux zones de consommation qui en ont besoin. Tout cela nécessite une implication réelle de l’Etat pour éradiquer ces fléaux. Le développement de tout pays commence par là. La république cubaine qui est citée comme un pays progressiste a pu démontrer qu’avec la vision et la volonté, on peut lever ces obstacles.
Quant à la bonne gouvernance, elle a forcément un lien avec la sécurité alimentaire car chaque erreur dans la gouvernance de la sécurité alimentaire a toujours été fatale mais aussi cette gouvernance concerne tous les secteurs administratifs et le privé. Un accent particulier doit être mis sur le professionnalisme, le patriotisme et l’intégrité de tous les travailleurs. Et pour cela, il faut une objectivité dans les recrutements administratifs et la rigueur dans le choix des responsables. Le Président Thomas SANKARA ne cessait de le dire, « l’homme qu’il faut à la place qu’il faut ». Tout chef de service qui n’a pas la conscience professionnelle et le patriotisme dans son comportement ne créera que des mécontents dans son service et c’est cela qui crée le favoritisme et les détournements. Aucun pays en voie de développement ne pourra s’en sortir sans cette rigueur. Je pense que la Chine et le Japon donnent de très bons exemples dans ce sens. Dans certains services en Afrique, la bonne gouvernance signifie que l’Etat augmente leur budget pour qu’il y ai suffisamment d’argent. A mon avis, cela a souvent occasionné des détournements que moi j’appelle « augmenter pour manger ». Pour moi, la bonne gouvernance, c’est mettre l’argent dans l’essentiel. Le professionnalisme et le patriotisme permettent de faire beaucoup avec peu et c’est ainsi que se fait le progrès. Le jour où il y en aura plus, nous devons pouvoir faire de bons qualitatifs sans lesquels nous serons toujours à la traine et continuerons à courir derrière les crédits que nous utiliserons mal. Nous contribuons en ce moment à rendre la vie difficile aux générations futures. La résolution des problèmes cités par l’atelier peut vraiment aider pour le développement du Burkina Faso.      
  En tant que vétéran agricole
Ouagadougou, le 20 Novembre 2017
TRAORE B. François,
Agriculteur Burkinabé
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
www.francoistraore.blogspot.com

lundi 6 novembre 2017

CE QUE JE PENSE DU RENOUVELLEMENT DES CHAMBRES D’AGRICULTURE AU BURKINA FASO



En 2004, sous l’ordre du ministère de l’agriculture, les premières chambres d’agriculture ont été installées. En tant que Président de la Confédération Paysanne du Faso (CPF) et de l’Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina (UNPCB) à l’époque, j’ai participé et contribué au processus jusqu’à la mise en place des chambres. Ce que j’avais compris personnellement dans ce processus, était que cette chambre devait avoir ses représentants dans tous les villages avec par la suite une structuration verticale. Pour le premier mandat, nous avions voulu que la force des chambres soit au niveau régional pour prendre en compte les spécificités de chaque région. Et c’est par la suite qu’il y a eu une instance nationale. Dans ma compréhension, la chambre d’agriculture, depuis le village devait être le canal par lequel la structuration professionnelle devait aboutir. Comme les structures professionnelles qui existaient n’avaient pas atteint tous les ruraux, la règle professionnelle qui était l’organisation par filière devait être facilitée par les représentants des chambres depuis le village. Ce qui n’empêchait pas ces structures professionnelles d’être autonomes tout en gardant de bonnes relations avec les représentants des chambres d’agriculture. Nous sommes aujourd’hui en 2017. Nous avons toujours des problèmes avec la structuration professionnelle des acteurs dans les filières alors que la bonne organisation des filières reste la condition sin qua non pour le développement des filières, pour un bon accompagnement spécifique, la facilitation des approvisionnements et la commercialisation. C’est dans cette situation que la loi OHADA sur les sociétés coopératives a vu le jour. Les coopératives pour le développement ont une envergure universelle. Je soutien cette idée car j’ai été choisi comme ambassadeur des coopératives par le système des Nations Unies en 2012. Les coopératives ne s’opposent pas à l’organisation des filières, donc une continuité.
En cette fin 2017, le ministère de l’agriculture vient de programmer le renouvellement des chambres d’agriculture. J’ai même appris qu’une formation a été organisée par ledit ministère pour les agents qui accompagnent ces renouvellements, chose qui peut être utile si nous voulons résoudre les vrais problèmes du monde rural. Les périodes ont changé, nous avons un nouveau gouvernement dont le Président a été démocratiquement élu après une insurrection. Ce qui veut dire que nous ne sommes plus à une époque où le peuple doit subir ; nous sommes en face d’un peuple qui réclame ses droits.  Ces droits doivent être suivis par le devoir bien accomplit de tout un chacun. Or au Burkina Faso, aucun agent technique d’accompagnement des ruraux ne peut dire les surfaces cultivées dans un village et le nombre des acteurs selon leurs métiers. Je souhaite cette fois-ci qu’au moins les représentants des chambres d’agriculture depuis le village soient formés pour recueillir ces informations qui sont le b.a.-ba pour un accompagnement technique efficace et une bonne structuration des ruraux. Pour ce faire, dans les choix des représentants de ces chambres d’agriculture, il faut aussi avoir des hommes de volonté dont la crédibilité est reconnue par les villageois. Pour la suite de la structuration verticale, cette volonté et crédibilité doivent être la boussole pour le choix des représentants. Dans l’ancien système de gouvernance, après la révolution du 4 août au Burkina Faso, la bonne qualité du leader n’était plus importante. C’est pour cela qu’on avait souvent des opportunistes et des marionnettes qui ont souvent travaillés au détriment de ceux pour qui, ils étaient élus. C’est pour cela que dans nos innovations qui étaient souvent de bonnes choses, on ne tardait pas à régresser. De nos jours, le Rwanda est cité comme exemple de développement dans tous les domaines dont l’agriculture. Certains disent que les rwandais ont tiré beaucoup de leçons dans la révolution du 4 août du Burkina Faso. Ce que nous apprenons également sur le Rwanda est que la rigueur est de mise vis-à-vis des leaders à tous les niveaux de gouvernance. Aucune faute ne passe inaperçue et c’est cette rigueur dans la pratique qui donne les résultats à la hauteur des défis à relever. Il n’y a pas donc de honte à ce que cette rigueur revienne au Burkina Faso et que d’ici 2020 le Burkina prenne sa place de leader dans l’innovation et dans le développement du milieu rural qui constitue plus de 80% de la population. Si le monde rural se développe, il n’aura pas de problème à faire fonctionner les moins de 20% de la population restante. En avant pour cette complémentarité positive.     
En tant que vétéran agricole
Ouagadougou, le 06 Novembre 2017
TRAORE B. François,
Agriculteur Burkinabé
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
www.francoistraore.blogspot.com

mercredi 1 novembre 2017

CE QUE JE PENSE DES KOUDOUS DU FASO ORGANISÉS PAR OXFAM



Du 27 au 29 octobre Oxfam a organisé la quatrième édition des koudous du Faso. Lors de ces koudous du Faso, les denrées alimentaires produits au Burkina Faso et transformés au Burkina Faso sont exposés par des transformatrices et transformateurs pour montrer la qualité de nos produits agricoles quand ils sont bien transformés. Oxfam et ses partenaires sont à féliciter car nous les paysans, nous savons que Oxfam a toujours été de notre côté pour mieux valoriser l’agriculture et nos produits. Sur place, j’ai été vraiment édifié par l’esprit de créativité de nos braves dames et hommes. La qualité de ces produits à la consommation n’avait rien à envier aux produits alimentaires importés. Ce qui veut dire que cette initiative est vraiment la porte de sortie de l’agriculture et de l’élevage. La garantie d’une bonne nutrition adaptée, de la création d’emploi et du développement endogène ne peuvent que passer par là.
Dans l’histoire de l’agriculture dans le monde, depuis son invention, c’est la transformation des produits qui a contribué à créer la différence entre l’homme et l’animal. Je peux même dire qu’elle est à l’origine de l’industrialisation. La femme a particulièrement joué un grand rôle dans cette transformation. Cependant, en Afrique et au Burkina en particulier, nous avons été devancés par les pays qui ont su modernisés cette transformation et comme nos politiques n’ont souvent pas eu cette idée comme outil de développement, nous avons été au fur et à mesure des consommateurs de produits importés souvent en nous disant que c’est des produits civilisés propres et irréprochables. Mais ce qui est vrai est que le Burkina se nourrissait et s’habillaient avant la colonisation et la majorité des personnes adultes d’aujourd’hui ont été nourris par ces produits locaux. Les produits importés que nous pensons propres ne sont pas forcément adaptés à notre habitude alimentaire. Ces produits pour leur conservation, ils sont souvent mélangés à des choses qui ne sont pas bonnes pour la santé de l’homme. Ce qui fait que la majorité des cinquantenaires trainent aujourd’hui des maladies dont ils ne savent pas la cause exacte. Mon père me disait qu’un homme digne doit pouvoir se nourrir de ce qu’il produit, la fierté au village était que le panier de ta femme ne soit jamais devant le grenier de quelqu’un d’autre pour chercher des céréales et se nourrir.
Ce koudou est donc l’occasion pour moi d’interpeler nos politiques sur la transformation et la consommation des produits locaux. Autant nous agriculteurs, nous devons libérer notre génie créateur et cela nécessite bien sûr un accompagnement si nous voulons aller vite ; autant le politique doit persévérer dans son patriotisme alimentaire pour que les burkinabés nourrissent les burkinabès. Avec plus de 80 % de la population burkinabé qui est rural, cela n’est pas extraordinaire. Au Burkina, nous avons eu la révolution du 4 août 1983 qui a montré le chemin. C’est l’occasion pour moi de féliciter nos autorités actuelles qui sans bruis, ont adopté le port du Faso Danfani comme philosophie et nous savons que c’est des burkinabés qui gagnent des revenus à travers cela. A une époque donnée, pour une cérémonie, certains ministres commandaient des costumes très chers à l’extérieur du pays pour paraitre ministres. Je ne suis pas scientifique mais je sais que le soleil que nous avons pour nos aliments est un atout pour leurs qualités. Oxfam dans l’accompagnement de ces braves dames et hommes est entrain de démontrer cette qualité. Merci donc à Oxfam et ses partenaires. Mon souhait est donc que le Burkinabè se nourrit de produits Burkinabès transformés par des Burkinabés.
En tant que Agriculteur Burkinabé
Ouagadougou, le 01 Novembre 2017

TRAORE B. François,
Agriculteur Burkinabé
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
www.francoistraore.blogspot.com