mardi 26 août 2014

Ce que je pense de la société civile africaine en politique

Dans la société civile africaine, nous avons deux groupes d’acteurs. Ceux qui ont pu allez à l’école et ceux qui n’ont pas eu l’occasion d’y aller. Ceux qui n’ont pas pu aller à l’école ont eu leur formation idéologique soit au village à travers la tradition, ou soit dans la société. Car, il y a cent ans de cela, un villageois pouvait naître, grandir et vieillir sans avoir quitté son village ou sa région. De nos jours, ce n’est plus le cas. Sur cent personnes, près de la moitié a déjà connu une autre région ou un autre pays. La collaboration qui se limitait entre famille ou entre villageois s’est étendue à ceux qui sont ni de la famille et ni du village. L’intérêt du villageois s’est donc élargit à d’autres. Cela a tendance à créer une philosophie de développement que j’appelle  politique.
Après les indépendances, ceux qui ont pris le pouvoir administratif étaient ceux qui étaient allés à l’école. Jusqu’à nos jours, à l’heure de la démocratie, ce sont les mêmes qui gouvernent. Les ressources naturelles africaines sont entrain d’être exploitées. Toutes les évaluations de l’exploitation de cette richesse  montrent que la société civile ne bénéficie pas assez des résultats de cette exploitation. L’Afrique est le continent où les jeunes sont majoritaires. L’exploitation de cette richesse ne permet pas d’employer toute cette jeunesse. La jeunesse africaine, au lieu d’être un avantage, est devenue un inconvénient. La démocratie est aussi devenue un outil de campagne politique mais pas un outil de développement. Tout cela est géré par une partie de ceux qui ont été à l’école.
 L’analyse de ces deux situations m’oblige à donner mon avis par rapport à la politique pour le développement. Traditionnellement en Afrique, la parole donnée d’un homme dans sa société était irrévocable. C’est la crédibilité de l’engagement, la combativité qui était la fierté de notre société. L’instruction et la modernité devraient être un plus pour cette crédibilité. Malheureusement, c’est le contraire qui est souvent constaté. Le fait d’être instruit donne l’opportunité à certains dirigeants  de rendre plus obscurs les citoyens. Comme dans la société civile africaine, certains citoyens sont  instruits, d’autres, sans être instruits, sont  éveillés parce qu’ils se sont déplacés ou parce qu’ils sont informés par les medias, la corruption est  utilisée pour faire la politique. 
Pour moi, il y a corruption que lorsqu’on  veut avoir quelque chose qu’on ne mérite pas, ou soit, on veut s’engager sur quelque chose qu’on ne va pas respecter. Cette façon de faire de l’homme politique moderne a détruit toute la confiance dans les villages. La réalité est que dans les villages, la politique se fait en distribuant des billets de banque. Comme cette façon de faire du politique n’est pas souvent en lien avec les activités des ruraux, après les élections, ce sont les citoyens qui vont vers l’administration pour bénéficier de ses services tout en payant. Pendant cette période post-électorale, le citoyen ne sait pas que c’est l’argent qu’il avait reçu lors des campagnes électorales, qu’il rembourse. En effet, le citoyen  se rend compte que les engagements d’investissement ne sont pas tenus sans comprendre que c’est l’argent de cet investissement qu’on lui partageait.
Pour que tous ces faits changent, il faudrait que  les citoyens africains comprennent qu’ils sont tous des acteurs économiques. L’instruction et la politique doivent être au service de leurs activités. Cela ne contredit pas la tradition, ce ne sont que des outils que nous pouvons utiliser dans le bon sens pour aller plus rapidement au développement. Avec la décentralisation, les habitants d’une localité doivent savoir que c’est dans la cohésion qu’ils peuvent se développer. Les qualités qu’ils doivent puiser dans la tradition pour faciliter la décentralisation sont la crédibilité et le respect de la parole donnée. C’est en cela qu’ils ne vont pas se faire tromper par les hommes politiques mal intentionnés. La technologie a permis à ce qu’il ait des outils de communications modernes. Si ces outils sont bien utilisés pour la conscientisation du citoyen, l’Afrique peut prendre un raccourci pour arriver au développement. Nous avons les moyens pour ça.
Ouagadougou, le 25 août 2014
TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr  
Skype:dadilotbf52                                                                                   
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 BURKINA FASO

mercredi 6 août 2014

Ce que je pense de l’incivisme au Burkina Faso

La population du Burkina Faso est composée de plusieurs ethnies et chacune de ces ethnies avaient des coutumes (traditions). Ces coutumes contenaient des initiations obligatoires pour assurer une transmission fidèle des règles de conduite. L’arrivée des religions a eu des impacts sur la tradition. Si on réalise une étude dans chacune  des coutumes et des religions, on se rendra compte que les règles fondamentales d’une société étaient respectées. Parmi ces valeurs, on peut citer le caractère  sacré de l’être humain, le respect de la hiérarchie entre père et fils, l’amour entre les uns et les autres au sein d’une famille d’une part, et d’autre part, avec les autres familles,  la cohésion dans le village et le bon voisinage entre villages voisins. La parenté à plaisanterie a été adoptée pour aplanir les conflits entre villages voisins ou entre ethnies différentes.

Il y avait quand même des individus qui malgré l’éducation et leur initiation, violaient ces règles communautaires. Pour cela, des sanctions  étaient prévues. Ces sanctions pouvaient être par exemple d’ordre matériel (un poulet, une chèvre, du dolo), pour certaines religions ça pouvait être une suspension de la communauté. La sanction extrême de toutes ces entités étaient le bannissement. L’ensemble de ces sanctions étaient valables pour toutes les catégories de personnes vivantes dans la société.

L’analyse de la situation sociale actuelle au Burkina Faso me fait dire que la transition entre la tradition et la modernité n’a pas été bien faite ; nous devrions retenir les bonnes règles traditionnelles et les améliorer par rapport à l’évolution de notre civilisation.

La période de la modernisation de notre population que je peux citer a commencé avec la colonisation. À cette époque, des jeunes ont été choisis par le colon pour être des soldats sous le regard impuissant de leurs parents; ces jeunes ont été formés pour aller en guerre. Après cette phase de formation militaire des jeunes africains, il y a eu l’arrivée de l’école de « l’homme blanc ». Ces écoles étaient soit initiées par les colons, soit par les religieux. La plus part des soldats et des élèves burkinabés étaient initiés aux traditions avant de partir. Cette double expérience vécue par ces jeunes a forcément fait d’eux, une autre catégorie d’Hommes. Car ils sont à cheval entre la tradition et la modernité ; les règles de discipline nouvelles étant venues s’ajouter. Ces nouvelles règles étaient ignorées par l’autre couche de la population qui n’a eu accès à l’école.

Après l’indépendance, nous avons eu des régimes qui s’inspiraient de ces deux réalités pour créer une philosophie du développement de la nation burkinabé, et ce, jusqu'à l’avènement du 15 octobre 1987. Un avènement sur lequel, la population n’a pas eu la même compréhension et il fallait pourtant gouverner et la faire adhérer au processus. Selon le public cible, différentes méthodes ont été utilisées pour convaincre la population. Ce qui l’a poussé à adhérer. À partir de ce moment, une philosophie d’éducation de la population devait être mise en place pour mettre en confiance la population, encourager une bonne éducation, la sociabilité, l’intégrité, le patriotisme etc. Malheureusement, les stratégies utilisées telles que la violence, la corruption, les détournements des biens publics, la gabegie, le népotisme, le clientélisme, l’intimidation, l’installation de la psychose de la peur pour faire adhérer le peuple burkinabè au système n’ont pas facilement  permis de cultiver ces valeurs sociales du Burkina Faso d’autrefois et d’améliorer significativement la qualité de l’éducation.

Le résultat de ce système est l’incivisme croissant dans le pays. On a assisté à des détournements et à des crimes impunis par certains responsables. La justice est taxée de complice ou d’impuissante dans cette situation. Le phénomène récurent, c’est de se faire justice soit même. En effet, lorsqu’un accident causé par un véhicule survient, le véhicule est immédiatement brûlé. Dans les conflits agriculteurs/ éleveurs, on constate des pertes de vies humaines et de bien matériels. Les évènements de 2008 contre la vie chère, ceux de 2011 sont aussi illustratifs : feux tricolores cassés, véhicules et bâtiments incendiés etc.  

Depuis 1987, certaines personnalités burkinabés comme Joseph KI-ZERBO, Laurent BADO, Bénéwendé SANKARA, Etienne TRAORÉ, Hama Arba DIALLO, Norbert TIENDÉBRÉOGO… ont refusé de suivre le navire. D’autres tels que Zéphirin DIABRÉ, Ablassé OUÉDRAOGO… ont adhéré croyant influé à un moment donné positivement le système. Ils ont été débarqués ou ont quitté. Les plus patients qui ont résisté pensant toujours à un changement positif et qui finalement n’avaient plus d’espoir, ont fini par quitter. Ils se retrouvent aujourd’hui dans le Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP).

Mon cri de cœur ! Hommes politiques, religieux et de la société civile, vous êtes sollicités à créer une philosophie nouvelle qui permet de conscientiser le peuple en commençant par les dirigeants pour que l’intégrité dont nous nous réclamons, soit une réalité. Nos ancêtres ne comprendrons pas qu’à leur temps, ils l’ont défendu et qu’à notre tour, femmes et hommes civilisés, nous n’y arrivons pas.

Lors du passage du président américain Barak OBAMA au Ghana, il a dit que l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais d’institutions fortes. Ceux qu’il appelle à mon avis, hommes forts ne sont pas à confondre aux leaders. MOBUTU était un homme fort mais Nelson MANDELA, Martin Luther KING, Mahatma GANDHI étaient des leaders. Ce sont eux qui créent les institutions fortes. Ce type de leaders, nous en avons besoin au pays des Hommes intègres. Ils ont l’habitude de créer des institutions fortes et éclairent tout le monde afin que chacun soit à un niveau de compréhension pour la cause commune. Pour MANDELA, le bonheur est pour tout le monde, mais le malheur est à combattre si possible pacifiquement.

Ouagadougou, le 04 août 2014

TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr  
Skype:dadilotbf52                                                                                   
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