mardi 27 août 2013

Ce que je pense de la fin de la crise au Mali


Le Mali a vécu une crise et une des solutions à cette crise a été la tenue des élections présidentielles. Tout le monde entier a trouvé ces élections difficiles mais réussies. Ibrahim Boubacar Kéita dit IBK est sorti vainqueur à l’issue de ces élections. Il m’arrivait de suivre la campagne électorale à la télévision. J’ai retenu trois idées sur lesquelles tous les candidats revenaient. Il s’agit de  l’unité du Mali qui doit être préservée ; la lutte contre la corruption; une bonne éducation et une formation adéquate pour les jeunes afin de les rendre aptes à servir convenablement leur nation.

Comme ces élections se sont déroulées en deux tours, il y a eu forcement deux camps. Pour quelqu’un qui suit les élections en Afrique, chaque fois qu’il y a deux courants de ce genre, cela fait peur parce qu’il y aura quelqu’un qui va diriger et un groupe d’opposition. Mais ce qui m’a rassuré pour le cas du Mali, c’est que les deux parties sont unanimes sur les trois conditions du développement. 

Selon IBK, à propos de la corruption par exemple, il dit « tolérance zéro ». Nous savons que la corruption n’est pas faite par le petit paysan de Pèrèkui  dans le cercle de  Mandjankui  ou par celui de Tabaco  dans le cercle de Kita. L’essentiel de la corruption est faite par les gros bonnets. Je suis donc sûr que le pouvoir et l’opposition vont être unanimes pour traquer cette corruption et pour éviter que les corrompus et corrupteurs se cachent derrière l’opposition.

Tout ce que je souhaite, c’est la fin définitive de cette crise. Je suis originaire de Konkui dans la province de la Kossi (chef lieu Nouna) à quelques dix kilomètres du Mali. J’ai un de mes champs à Sogodjankoli dans la province  des Banwa (chef lieu Solenzo) également situé à quelques dizaines de kilomètres du Mali. Donc si une crise perdure au Mali, je ne peux pas rester indifférent. En tant que président d’honneur de l’Association des Producteurs de Coton Africain (AProCA), j’ai toujours dit que la guerre constitue une entrave au métier agricole. 

J’ose croire que le peuple malien est aussi conscient de cela et saura se donner la main pour le respect et l’application stricte des trois principes fondamentaux du développement prônés par les différents candidats afin de garantir une relève réussie du Mali. 

Que Dieu accompagne le nouveau président pour la paix au Mali !
 
Ouagadougou, le 27 août  2013
TRAORE B. François,
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
Président d’honneur de l’AProCA,
E-mail :dadilotbf52@yahoo.fr                                                                                         
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 (+226) 78 50 16 25

vendredi 9 août 2013

Ce que je pense de la place de l’éducation et de la formation dans le développement en Afrique : en particulier dans le secteur agricole


Avant la colonisation, l’éducation et la formation  étaient la préoccupation de chaque famille et de chaque communauté. Tout bon père voulait que son fils lui ressemble ou lui dépasse. Dans la société, ces préoccupations étaient regroupées. C’est ce qu’elle appelait les initiations. Il y avait alors la responsabilité du père et de la mère, de  la grande famille et de la société dans la formation et l’éducation des enfants. Ce qui faisait que chaque ressortissant d’un village devait être fier d’appartenir à son village. Chaque village avait des atouts dans des domaines différents. C’est ainsi qu’il y avait des villages reconnus comme bons agriculteurs, bons éleveurs, bons pécheurs et certains bons guerriers. D’autres villages excellaient dans l’artisanat et le commerce. Mais chacun se battait pour avoir chacune de ces capacités.

La colonisation a amené l’école moderne. Cette école moderne a atteint ces objectifs en formant des administrateurs. Après la colonisation, nous avons eu des gouvernements qui ont pris le relais. 50 ans après l’introduction de cette école, je me pose la question si la mayonnaise a vraiment pris. Il m’arrive également de me poser la question si l’instruction n’a pas souvent pris la place de l’éducation. Je fais parti de ceux qui ont pu aller à l’école dans les années 1960 ; elle m’a permis de savoir lire et écrire. Mais je me suis arrêté au Certificat d’Etudes Primaires (CEP), donc les 6 premières classes. 

Il arrive que des gens me disent que cela est faux car selon eux,  j’ai fait plus d’études que le niveau certificat. Pour eux ma capacité analyse en est une preuve. Quand j’arrive à leur démontrer que je n’ai que le certificat,  ils me disent que le certificat des années 1970 vaut mieux que le BEPC des années 2000. Je leur dit que la majorité de nos enseignants était pourtant du niveau certificat, maximum niveau BEPC. Cela m’amène à cette interrogation: est ce qu’on continue à bien instruire ? 


J’ai suivi un jour un reportage sur la Chine à la télévision.  Dans la recherche de la performance, certaines écoles chinoises refusaient des handicapés parce qu’elles se disent qu’ils ne pourront pas suivre leur rythme de formation. Comme chez eux la recherche de la performance fait que chaque école veut faire du 100%, si dans une classe de 30 élèves, un seul n’arrive pas à suivre, l’enseignant se bat pour rehausser son niveau pour ne pas hypothéquer son score de fin d’année. C’est le raisonnement d’un bon éducateur. L’intention certes de ces écoles chinoises n’est pas de refuser l’handicapé, chose qui ne serait pas louable, mais parce qu’elles sont préoccupées par éduquer et mettre des  Hommes bien formés, aptes à produire pour leur nation. 

Ce ne sont pas des écoles où on apprend qu’à lire et à écrire. Il y a simultanément transmission du savoir, du savoir être et du savoir-faire. Un éducateur éduque pour sortir du produit utile et opérationnel aussitôt après.  Ce n’est donc pas surprenant que la Chine soit une puissance économique aujourd’hui. L’éducation fait partie de la préparation de l’Homme pour son développement. C’est elle qui oriente la carrière des Hommes.

Pour ce qui est de la formation professionnelle en Afrique,  j’ai l’impression que ce qu’on fait sur les papiers et dans les salles de conférence bénéficie plus aux formateurs qu’aux apprenants. La formation est rarement axée sur l’activité pratique. Dans mon domaine, celui de l’agriculture,  le problème de la formation professionnelle ne se résoudra jamais  dans les salles de conférence. Cette formation ne peut réussir qu’avec des exemples concrets sur le terrain à l’image du Centre Songhaï au Benin. Généralement on dit que cela coûte cher alors que le développement dans l’agriculture n’est possible que par des exemples concrets et non pas par des messes. 

Le conseil agricole doit également être revu. Chaque agent doit pouvoir être évalué avec la participation des agriculteurs pour mesurer le plus qu’il aura apporté à leurs revenus. C’est de cette manière qu’on pourra mieux valoriser l’investissement dans l’agriculture. On m’a dit qu’aux Rwanda tout responsable doit s’engager à atteindre un objectif par an. Il est évalué à la fin de l’année conformément à ses engagements, non pas que sur le papier mais sur ce qu’il aura réalisé de concret.

Pour moi, l’éducation  qui a fini par être de l’instruction et les rencontres dans les salles de conférence ont montré leurs limites. L’agriculture ne doit pas être basée sur les conférences même si elles sont souvent nécessaires pour la bonne planification du métier. De toute façon, les changements climatiques, la désertification et la démographie nous obligent à changer rapidement de comportement sinon il pourrait être trop tard.
 
Ouagadougou, le 09 août 2013
  TRAORE B. François,
  Président d’honneur de l’AProCA,
  Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux