jeudi 23 mai 2013

Ce que je pense de l’organisation mondial du commerce (OMC) et de son nouveau directeur


L’OMC vient d’avoir un nouveau directeur. Il s’agit du brésilien Roberto Azevedo. Depuis Cancun en 2003,  l’OMC a des problèmes à prendre sa place. Par rapport  aux engagements de Doha, le dossier du coton fait partie des sujets qui ont influencé les débats de l’OMC. Nous savons que sur ce même dossier coton le Brésil a déposé plainte contre les américains. La revendication des cotonculteurs africains est une pilule qui n’a été avaler ni rejeter. Cela me pousse à poser les questions « que fait l’OMC ? A quoi doit-elle servir?».
J’ai toujours été pour l’existence d’une structure comme l’OMC. Pour moi, elle doit permettre de réguler le commerce pour que l’homme ne soit pas l’outil du commerce mais que le commerce soit l’outil qui lui permet de s’épanouir après ses efforts. Les grands pays ont souvent tiré la couverture de leur côté pendant les négociations mais, cela n’a pas empêché la crise financière aux Etats-Unis comme en Europe ; même pendant que le président de la Banque Mondiale est américain et celui du FMI européen. Cela veut donc dire que le secret de l’économie n’est pas dans la main de quelqu’un.
C’est pourquoi je pense qu’il est temps que les pays développés acceptent que le commerce soit utile pour les pays en voie de développement parce que ces pays constituent un marché ne serait ce que pour l’industrie et le machinisme. Mais, il faut que ces pays en voie de développement vendent et gagnent pour acheter. Aujourd’hui, l’achat des avions par les pays émergents est un exemple.
Sur le sujet du coton, les négociateurs africains ont montré leur solidarité. Je souhaite que cette solidarité continue dans le dossier coton et sur toutes les matières premières en Afrique. L’Afrique doit avoir le bénéfice de sa matière première. C’est de cette manière que l’Afrique peut émerger. Dans ce sens, à ce que je sache, beaucoup de pays émergents à l’image du Brésil ont toujours soutenu l’Afrique.
C’est l’occasion pour moi de souhaiter courage et détermination au nouveau Directeur de l’OMC. L’histoire retiendra toujours les grands hommes qui ont toujours su gérer les grandes situations. Je sais  que le Brésil n’a pas soutenu sa candidature pour qu’il échoue. Je souhaite donc le dénouement sur les engagements de Doha et que le commerce permette à l’humanité d’être prospère.

Ouagadougou, le 11 Mai 2013
TRAORE B. François,
 www.francoistraore.blogspot.com                                                                                          
 Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25

samedi 11 mai 2013

Ce que je pense de la première promotion des étudiants en master en économie et politique agricole.


J’ai été invité le 04 mai 2013 à l’université de Ouagadougou par la première promotion des étudiants en master en Economie et politique agricole pour faire une conférence. Ils  sont recrutés dans le cadre du Programme de Troisième Cycle Interuniversitaire (PTCI) en économie. Ce programme  regroupe 17 pays de l’Afrique. Ces étudiants au nombre 30 bénéficient chacun d’une bourse de la Fondation Melinda et Bill Gates (BMGF), qui a financé le programme. Les autres partenaires du PTCI sont l’Alliance pour la Révolution Verte (AGRA), l’ONG de Koffi Annan et le Programme Agriculture et Sécurité Alimentaire du CRDI (Institut de recherche canadienne).
L’objectif global de cette nouvelle filière de formation est de combler le déficit d’expertise en matière d’élaboration et de mise en œuvre de politique agricole en Afrique et d’améliorer la gestion économique de ces pays africains dans le cadre du développement rural et de la lutte contre la pauvreté.
Les étudiants sont formés pour pouvoir exercé dans les domaines de l’enseignement, les Ministères,  le secteur Privé, les Instituts et Centres de recherche, les Institutions Internationales, les ONG, etc.
Selon les étudiants, il est prévu dans leur programme des conférences données par des acteurs du terrain. C’est dans ce sens qu’ils m’ont fait appel pour partager mes expériences avec eux autour des thématiques « coton et sécurité alimentaire et la place du coton génétiquement modifié dans la filière cotonnière burkinabè ».  Pour moi, dans la production cotonnière au Burkina Faso, la recherche a recommandé comme itinéraire technique la rotation entre le coton et les céréales. Ce qui veut dire que chaque fois dans un champ, la superficie occupée par le coton est utilisée pour les céréales l’année suivante. L’essentiel de ces céréales au Burkina est devenu du maïs à près de 60 à 70% dans la zone cotonnière.
Cela a fait des producteurs de coton les meilleurs producteurs de céréales. Le rendement en maïs de ces producteurs de coton est satisfaisant parce que non seulement ils bénéficient de l’arrière effet de l’engrais mis dans le champ de coton ; ils reçoivent également de l’engrais pour leur maïs. De plus mon expérience en tant que agriculteur m’a donné la preuve que l’important feuillage de coton qui tombe en fin de cycle constitue de la matière organique qui se décompose et devient une source nutritionnelle pour la culture céréalière qui succède au coton. Tout cela contribue à augmenter le rendement du maïs après le coton. Je vais même dire que grâce à la rotation, les paysans ont perçu la rentabilité  du maïs ; Car pour une famille qui produit 5 ha de sorgho pour subvenir à ses besoins alimentaires, deux ha de maïs suffisent pour le faire.
Le coton est un des rares cultures de rente que je connais  et qui a un lien étroit avec les céréales. En plus un kilogramme (kg) de coton graine contient environ 43% de fibres et 52% de graines. La graine est très nutritive pour les animaux. Un kg de cette même graine contient de l’huile consommable par l’homme qui est évaluée à 36%. On peut donc dire que dans un kg de coton graine, hormis la fibre, il y a 52% de graine qui contribue à la securité alimentaire. On sait également que dans sécurité alimentaire il y a revenus; c’est pour dire que l’argent du coton contribue à la securité alimentaire.
Quant au Coton Génétiquement Modifié (CGM), le Burkina est parmi les premiers à le produire en Afrique. Cela suite à un  certain nombre de problèmes de parasitisme que les producteurs ont vécu. Le producteur de coton burkinabè qui avait découvert l’intérêt de l’argent du coton et tout ce que le coton lui rapporte, ne voulait pas que ce soit le parasitisme qui l’empêche de produire son coton. C’est dans cette inquiétude que les producteurs, les sociétés cotonnière et l’Etat ont été obligés de se donner la main pour introduire cette technologie au Burkina Faso.
Moi particulièrement, cela fait cinq ans que je cultive le CGM. J’encourage la recherche et les partenaires (sociétés cotonnières) à tout faire pour qu’on continue  à avoir cette semence qui est multipliée sur place au Burkina par nous même les producteurs de coton car moi-même je suis semencier.
Mon appréciation pour cette promotion universitaire, est que l’initiative est salutaire. Parce que pour moi en Afrique il n’y a pas pour le moment  des politiques agricoles adéquates. Dans un pays où  il existe une politique agricole, avec 80% de population agricole, on ne peut pas continuer à ne pas atteindre une souveraineté alimentaire. Les céréales que nous cultivons en Afrique pour nous nourrir, sont cultivées et destinées à la l’alimentation du bétail dans d’autres pays comme le canada, les Etats-Unis et la  France. Quand ces céréales manquent à ces animaux, il y a un scandale et tout le monde entier est secoué.
Un de mes amis Français m’a déjà dit que nous sommes « des manges mil » parce que nous mangeons directement les céréales, alors que eux, ils ont dépassé cela il y a longtemps. Dans ces pays, on ne peut plus avoir 5% d’agriculteurs. Comment nous pouvons démontrer à des gens de ces pays que nous avons 80% de notre population qui est agricole, que nous avons une politique agricole et que nous n’arrivons pas à nous nourrir ?
A la fin de ma conférence, j’ai encouragé ces jeunes à être endurant et persévérant. Il faut qu’ils aient le courage à s’engager à fond et vouloir risquer (entreprendre). Cela doit commencer depuis la phase estudiantine. Je leur ai dit que j’entends souvent des manifestations dans les universités. Ces mouvements de manifestation ont peut être leur raison, mais eux, je les encourage à s’imposer par l’endurance et la volonté de bien faire. L’expérience m’a montré qu’on change plus facilement les choses quand on travaille bien. Ce n’est pas parce qu’on est jeune qu’on ne peut être responsable et compétent.
Moi, j’ai été chef de famille à quinze ans. C’est dans mon endurance du travail bien fait que je me suis fait respecter. Je ne pouvais pas imaginer un  droit de revendiquer car mon père était aveugle et ma mère âgée. Ma seule issue était de me battre honnêtement. J’ai donc demandé aux jeunes de s’engager à bien faire dès leur vie estudiantine car leurs pays et l’Afrique compte sur eux. C’est le temps de l’Afrique maintenant, le temps de changement de mentalité. Quand quelqu’un s’engage à innover, le changement doit se sentir dans son comportement quotidien ; même dans son sommeil quand  il se couche, il doit se dire « je me suis engager à faire ça, est ce que je l’ai fait, je dois le faire » ; car l’handicap de l’Afrique ce n’est pas qu’on ne s’engage pas ! On s’engage mais cet engagement ne change pas le comportement et quand le comportement et le mental ne changent pas, rien ne sera fait pour ce dont on s’est engagé.
Ce que nous reprochons à nos devanciers, si nous ne changeons pas, nous ferons la même chose, alors nous subirons, et nous... Je souhaite bonne chance et courage à ces jeunes étudiants.
Ouagadougou, le 30 Avril 2013
TRAORE B. François,
 www.francoistraore.blogspot.com                                                                                          
 Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25

mercredi 1 mai 2013

Ce que je pense de la formation des jeunes leaders du secteur agricole


Dans le cadre de la poursuite de la formation que j’avais initié en 2010 avec l’appui du partenaire FARM, j’ai fait des tournées dans plusieurs provinces du Burkina dans lesquels j’ai rencontré des producteurs de structures différentes : des céréaliers, de cotonculteurs, des riziculteurs et des éleveurs. Ces rencontres  visaient à discuter sur les qualités d’un bon dirigeant, des stratégies de son choix et l’intérêt  de la relève du leader dans une structure. Tout le monde était conscient qu’il fallait travailler à conscientiser la jeunesse pour une nouvelle vision de l’agriculture.

Aujourd’hui, la jeunesse a accès aux multiples informations à travers les medias. Elle est souvent poussée à aller chercher le luxe dans les villes et dans les sites d’orpaillage où elle est laissée à elle même. Nous avons trouvé que c’était mieux de les accompagner à ce métier agricole où ils ont besoin d’être rassurer que le développement dans l’agriculture est possible.

Ma mère m’a dit un jour que «c’est pendant tu as l’énergie que tu dois décider de bien l’utiliser. Que tu l’aie utilisé ou pas, à 70 ans tu n’auras plus cette force physique. S’il se trouve que tu n’avais pas fait le bon choix pour bien utilisé cette force pendant ta jeunesse, cette énergie n’aura que traverser ton corps». Travailler bien physiquement doit être accompagné par réfléchir très bien pour mieux gagner. Cela veut dire avoir l’esprit d’entreprise dès le jeune âge.

A la fin de chaque tournée, des jeunes devaient être choisis par leurs localités pour être former dans cet esprit. Cette formation s’est déroulée du 2 au 5 avril 2013 à Moundasso (Boucle du Mouhoun) sous le thème « Leadership pour une action paysanne démocratique » et avait comme animateur, Fabrice Larue de FARM, et comme intervenants Marilyn Côté, productrice de lait et membre de la Fédération de la relève agricole du Québec (FRAQ) et moi même Traoré François, ancien président de l’UGCPA.

La présente formation sur le leadership a permis aux jeunes leaders du secteur agricole de mieux appréhender les principes du concept et les qualités à avoir pour devenir un bon leader. De manière simple, le leadership consiste à prendre les personnes là où elles sont et à les conduire à un niveau supérieur qualitatif. Le rôle du leader est d’être utile pour sa famille et sa localité.  
                                                           
Dans le secteur agricole, un leader est celui qui sait exprimer ses compétences pour l’émergence de son exploitation et qui sait l’extrapoler à son organisation. Dans ce contexte, une vigilance particulière doit être observée lors du choix des représentants des organisations paysannes car leur pérennité en dépend.

Concernant les qualités d’un bon leader, les participants ont confirmé que celui-ci doit être bon travailleur dans son domaine,  avoir le sens de l’écoute, être rassembleur, partager sa connaissance du travail, demeurer honnête et rigoureux. Le bon leader doit savoir qu’il apprend avec les autres. Il  doit aussi savoir changer de style pour s’adapter à des situations nouvelles. Il est toujours en quête d’innovations car s’il cesse d’apprendre, il cesse d’être leader. Les meilleurs leaders sont ceux qui savent qu’ils ont toujours à apprendre en partageant avec les autres.
Cette formation de Moundasso (Dédougou) a été également une instance de partages d’expériences entre  les jeunes et aussi avec des  vétérans du secteur agricole afin d’assurer une meilleure relève dans les exploitations familiales et dans les organisations paysannes.
On peut donc se réjouir d’avoir atteint les objectifs de cette  formation au regard des nouvelles idées pertinentes et des engagements quelle a suscité chez les participants. En effet, le problème d’accès à la terre, le problème foncier, l’insuffisance de professionnalisme dans  l’esprit entrepreneurial, le manque de responsabilité, l’augmentation des rendements par une bonne gestion des exploitations familiales, la mise en place d’organisations paysannes crédibles aux Burkina avec une implication effective des jeunes dans un esprit de leadership, ont été les principaux challenges que les participants ont décidé de relever dans les prochains jours.

En tant que vieux agriculteur, qui a été chef d’exploitation à l’âge de 15 ans, ayant commencé tout à zéro : pas de matériel agricole avec des difficultés d’accès à la terre, je connais plusieurs difficultés que vivent beaucoup de jeunes. Mon souhait a toujours été de partager mes expériences avec eux. Cette fois ci les jeunes producteurs ont eu accès à plusieurs expériences et c’est l’occasion pour moi de remercier Fabrice de FARM, Marilyn de FRAQ et également tous les 46 jeunes d’avoir accepté partager. Pour moi, la formation des 46 jeunes est comme une graine qu’on vient de semer et qui doit se multiplier. C’est le métier agricole et le Burkina qui y bénéficieront.

Ouagadougou, le 30 Avril 2013
TRAORE B. François,
 www.francoistraore.blogspot.com                                                                                          
 Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25