Après
que l’homme ait décidé de se sédentariser, il a prélevé des plantes dans la
nature qu’il entretient pour se nourrir et cela est devenu l’agriculture. Il a
également domestiqué des animaux selon son besoin. De la poule au chien, de la
chèvre à la vache, il a fait de ceux-ci sa propriété. C’est ainsi que ceux-ci
ont commencé à lui rendre service. Pour ce qui est des herbivores, l’homme a
continué à les faire nourrir par la nature. La nature étant très vaste, ces
herbivores étaient bien nourris et leur multiplication permettait à l’homme d’être
satisfait. L’homme a ensuite découvert qu’il pouvait partager avec les petits
de certains herbivores (la chèvre et la vache), le lait. Cela a contribué à
enrichir et à diversifier l’alimentation de l’homme.
Le
Burkina faisant partie de l’humanité. L’élevage constitue une source de
compléments alimentaires et une source de revenus. En 1969, quand je faisais la
classe de CM2, la population du Burkina était estimée à environ 4 millions d’habitants.
En 2016 on parle de 17 millions. Plus de 4 millions de burkinabé vivent à
l’extérieur du pays. La raison principale pour laquelle ces derniers ont quitté
le Burkina, c’est qu’ils ne trouvaient pas leurs comptes. Ils sont donc allés à
la recherche d’une vie meilleure. Sur les 17 millions d’habitants, environ 80%
sont des ruraux et vivent essentiellement d’Agriculture (productions végétale
et animale) et de petits commerces.
Sous
nos cieux, au lieu que ces deux activités soient, complémentaires, on assiste à
un conflit agriculteur-éleveur permanent. La cause profonde est liée à une
mauvaise gestion bidimensionnelle notamment la mauvaise gestion de la démographie
et celle liée à la modernisation de l’Agriculture (production végétale) et de
l’élevage (production animale). Moi en tant qu’acteur des deux activités, je dis
que ces conflits sont entretenus par la mauvaise vision des deux ministères. En
effet, il est très courant de voir les techniciens des ministères en charge de
l’agriculture et de l’élevage, gérer mal
cette complémentarité entre les deux activités. Ils sont souvent les animateurs
du conflit.
Il
m’est arrivé d’aller au Tchad. Ce conflit agriculteur-éleveur y existe mais ce
qui m’a marqué au Tchad est que les autorités tchadiennes aient décidé d’interdire
l’utilisation des sachets plastiques. Ils ont œuvré à joindre l’acte à la
parole. J’ai fait le tronçon N’Djamena Moundou, un tronçon de près de 500 km. Tout
au long du tronçon, on ne voit pas de sachets ni dans les villes ni dans la
nature. La raison avancée par les autorités tchadiennes est que les sachets
plastiques sont nuisibles à l’élevage et à l’agriculture. C’est un signal qui
ne résout pas tout le problème de modernisation mais qui montre que les
autorités savent que les deux métiers sont liés. Au Burkina Faso, la décision d’interdire
les sachets plastiques avait été prise sous l’ancien régime mais elle n’a
jamais appliquée. Je souhaite donc que le pouvoir actuel régénère cette
décision, s’attèle à son application effective sur le terrain tout en proposant
des alternatives adéquates aux utilisateurs des sachets.
Au Burkina Faso, une usine de
fabrication d’aliments pour bétail (SOFAB-SA) a été installée à Koubri à quelques trentaine de kilomètres
de Ouagadougou. Cela a suscité l’espoir
des éleveurs qui veulent moderniser leur élevage. Quant aux éleveurs qui
continuent leur activité dans la transhumance, comme l’herbe n’existe pas
pendant la saison sèche dans la nature, leurs animaux mangent les sachets
plastiques déversés dans la nature, ce qui fait que sur cinq vaches qui meurent
de faim, il y en a au moins quatre dont les ventres sont bourrées de sachets.
Pour que cela change, il faut que nous trouvions une autre source
d’alimentation de ces troupeaux. Cette source ne peut venir que de la
production végétale ; c’est-à-dire qu’il faut absolument produire pour
nourrir les animaux.
Dans
cet élan, l’usine SOFAB-SA
doit augmenter sa capacité de production et la matière première doit venir
forcement de l’agriculture. Je vois mal le Burkina importer des céréales ou des
oléagineux pour satisfaire cette usine. Avec plus de 15 millions de personnes
vivant dans le milieu rural, plus de 60% de cette population étant jeune et souvent
sans revenus, je ne souhaite pas que cette jeunesse soit transformée en voleurs
et en brigands. Le Burkina a des intellectuels, des penseurs et également plein
d’acteurs au développement. À quoi sert toute cette richesse humaine si nous ne
pouvons pas résoudre nos problèmes ? Alors faisons en sorte que la chaîne
tourne pour faire prospérer l’économie du Burkina pour l’intérêt de sa population.
Les peuples qui avancent, ce sont les peuples qui prennent les bonnes décisions
aux bons moments et qui les appliquent.
En tant que
Président d’honneur du syndicat des Agriculteurs du Burkina
Ouagadougou, le 05 juillet 2016
TRAORE B. François,
Agriculteur Burkinabé
Docteur
honoris causa de l’Université de Gembloux,
www.francoistraore.blogspot.com
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