vendredi 11 décembre 2015

Ce que je pense des prochaines élections municipales au Burkina Faso

Depuis le début de la transition, le Burkina Faso a entamé un virage très important vers le développement de la population. Le Gouvernement de la transition, le Conseil National de la Transition (CNT) et la Commission Electorale nationale Indépendante (CENI) ont bien compris ce que veut le peuple et ont tous contribué, chacun en jouant bien son rôle, au bon déroulement les élections présidentielles et législatives. Le développement n’est possible que si chaque Burkinabè se sent acteur, concerné, bénéficiaire. Cela demande une organisation. La formule d’organisation prévue par la constitution au Burkina Faso, c’est la décentralisation. C’est dans cette optique que les élections municipales sont prévues.

Dans l’histoire du Burkina Faso, je me rappelle de deux formes de décentralisations : celle de la révolution qui était illustrée par l’élection des CDR dont le côté positif était de permettre à la population de prendre en main sa destiné en choisissant ses dirigeants locaux. Quant à son côté négatif, la population n’avait pas souvent su choisir les hommes qu’il faut. Il est donc arrivé que l’effet contraire se produise ; c’est-à-dire que certains des élus ne travaillaient pas dans l’intérêt général de la population. Après cette révolution, nous nous sommes retrouvés dans une nouvelle forme de décentralisation avec des élections municipales. Mais plus de 15 ans après la pratique de cette nouvelle forme, le constat est que les résultats entendus par tous sont restés mitigés. Il y’a eu bien sûr des réussites par endroit mais pour moi l’échec est majoritaire et pire dans le milieu rural.

A titre d’exemple, je connais une commune rurale qui se situe à près de 500 kilomètres de Ouagadougou. Cette commune a eu un Maire qui habitait à Ouagadougou et qui pouvait faire souvent plus d’un mois sans aller dans sa commune. Quand une ONG voulait aider la commune en termes d’investissements, le Maire qui devait signer la convention  exigeait que l’ONG  paye ses frais de déplacement aller-retour (Ouaga-comnune-Ouaga). Cette ONG était dans sa commune et lui à Ouagadougou. La décentralisation exige des initiatives internes et volontaires. Or l’initiative interne nécessite une connaissance de la localité, une présence effective et permanente, une connaissance des mentalités de la population et une crédibilité. Pour cette crédibilité, le choix des Conseillers doit être bien réfléchi en tirant leçon du passé sans complaisance.

En souvenir, le Président Barack OBAMA disait que l’Afrique n’a pas besoin d’ « Hommes forts » mais d’institutions fortes. Après ce message, parmi les commentaires que j’ai entendus, certains disaient que sans « Homme fort » l’Afrique ne peut pas se développer. À mon avis, ces personnes ont confondu leader et «  Homme fort ». Pour un « Homme fort », c’est lui seul qui doit émerger ; les autres sous ses ordres. Il veut que les autres agissent strictement dans le sens qu’il veut. Au Burkina Faso, on appelle celui-ci « un mogo puissant ». Quant au leader, c’est un serviteur ; un éclaireur qui a une certaine longueur d’avance sur les autres et qui œuvre pour que tout le monde comprenne car malgré son intelligence, sa détermination, tout seul il ne fera pas avancer la société alors que c’est de cela qu’il s’agit. Dans tous les villages et les communes du Burkina Faso, des leaders existent.

Un ressortissant fonctionnaire qui souhaiterait accompagner sa localité en se faisant élire comme Conseiller doit se rassurer qu’il passe plus de temps dans la localité. Être Maire ne doit plus être un poste où un ressortissant cherche à abuser de la population et des ressources de la commune. Pour les ressortissants qui sont loin de leur commune d’origine, ils peuvent aider leur commune sans forcément prendre la place de ceux qui peuvent être sur place. Je prends pour cela l’exemple de la Bretagne en France. J’ai appris que c’est les ressortissants cadres qui travaillent ailleurs qui se sont donnés la main et ensemble ils ont soutenu ceux qui sont sur place. C’est ce qui fait que la Bretagne est devenue une région exemplaire en matière de développement locale en France. La majorité des industries selon mon information sur la Bretagne sont la propriété des communautés et emploient directement les jeunes.

Je souhaite désormais que les ressortissants fonctionnaires sachent que ce n’est pas seulement quand on veut un poste politique qu’on doit s’intéresser au village ;  je ne dis pas aussi d’aller au village pour partager de l’argent à la population mais partager des idées pour la cohésion du village. Je souhaite donc que les élections municipales prochaines soient bien réfléchies pour que la cohésion règne dans les villages et les communes. Cette cohésion est le passage obligatoire pour le développement tant attendue.

En tant que Président d’honneur du syndicat des agriculteurs du Burkina (SYNA-B)

Ouagadougou, le 11 décembre  2015

TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr  
(+226) 70 95 34 45
 (+226) 78 50 16 25

 BURKINA FASO

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