Du 23 au 24
octobre 2014, j’ai été invité par Bayer CropScience et la société cotonnière
camerounaise en tant que cotonculteur, à une conférence qui s’est tenue à Garoua
(Cameroun), sur le thème « Coton génétiquement modifié (CGM) : Enjeux
pour la filière cotonnière du Cameroun ». Ont pris part à cette conférence organisée par la filière cotonnière camerounaise
(SODECOTON) avec la collaboration de Bayer CropScience, les représentants des
institutions de recherche du Cameroun, du Burkina Faso (INERA), de la société
Bayer CropScience, de l’IRAD, du CIRAD… L’objectif de la
conférence était d’exprimer les enjeux de l’introduction du coton génétiquement
modifié (CGM) au Cameroun pour les producteurs et la filière cotonnière.
En
matière de biotechnologie dans le monde, 14 pays ont adopté la culture
du CGM en 2014. Parmi ces pays, l’Inde a représenté 46% de la surface cultivée en CGM. Au
total, 23,9
millions d’hectares de CGM ont été cultivés en 2014, soit 70% du coton cultivé (conventionnel
et CGM) dans le monde. Le Cameroun est à sa troisième année d’expérimentation
du CGM. Comme le Burkina Faso est un des premiers pays africains à adopter le
CGM, la SODECOTON et son partenaire Bayer, ont voulu que le Burkina Faso partage
ses expériences en la matière avec eux.
Moi en tant que producteur, ancien président
de l’union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB), j’ai
contribué à l’introduction de la
technologie au Burkina Faso. De nos jours, cela fait 07 ans que je produis ce
coton. Dans ma famille, sans le coton génétiquement modifié, nous allons
arrêter la production de coton. Comme le cotonnier génétiquement modifié est
« vacciné » depuis sa levée, il n’y’a pas de surprise d’attaque de
chenilles, ravageurs sérieux du cotonnier. Le cotonnier en bonne santé grandit
plus facilement à condition qu’il soit bien fertilisé. Le gène Bt est mis dans
une semence qui est une propriété du Burkina Faso. La multiplication de la
semence de base (CGM) est faite par les cotonculteurs burkinabés. C’est la
technologie qui appartient à Monsanto. Monsanto, en partenariat avec l’INERA, est
chargée d’introduire la technologie dans la semence burkinabè. La semence CGM
est une copropriété de la filière cotonnière burkinabé et de Monsanto.
Au moment de cette introduction du CGM au Burkina
Faso, certains nous (cotonculteurs burkinabés) considéraient comme des criminels.
Mais jusqu’à ce jour, ce coton n’a pas
fait de mal à quelqu’un ; la graine et l’huile sont consommées et la fibre
est vendue. Avec une production estimée à 766 221 tonnes de coton graine dont
60% de CGM au cours de la campagne 2013-2014, le
Burkina Faso demeure le premier pays producteur de coton en Afrique. Nous sommes heureux de constater que les camerounais ont eu la même réaction
que nous. J’ai toujours dit que la différence entre l’homme et l’animal, c’est
la capacité de l’homme à réfléchir, analyser et de choisir ce qu’il veut pour
résoudre son problème tout en réfléchissant au maximum à ne pas nuire aux
autres. La société cotonnière camerounaise est une des rares sociétés qui ont
pu tenir leurs têtes hors de l’eau pendant toute la crise cotonnière grâce à
son professionnalisme. Elle mène une relation de bon partenariat avec les
cotonculteurs regroupés dans les CNPCC.
L’expérimentation entamée par le Cameroun
et ses partenaires se fait avec deux gènes : le gène Bt et le gène
de tolérance du cotonnier au glyphosate. Ces essais sont faits avec de la
semence d’origine non camerounaise. Mais, la technologie sera introduite dans
la semence camerounaise pour être mise à la disposition des cotonculteurs
camerounais. La semence CGM sera une copropriété du Cameroun et de son
partenaire Bayer. La multiplication de la semence de base sera assurée par les
cotonculteurs camerounais.
Comme au Cameroun on fait beaucoup
de semis-directs et de semis sous-couverts végétal, un cotonnier immuniser
contre le glyphosate permet un nettoyage facile des mauvaises herbes par le
glyphosate. Vu le professionnalisme de la filière cotonnière, la SODECOTON et ses
partenaires producteurs sont également beaucoup avancés avec les régulateurs de
croissance. Selon eux, ces régulateurs de croissance diminuent la gourmandise
de la plante en taille. Ils réduisent également l’intervalle entre les
capsules. J’ai eu l’occasion de visiter des champs où ces régulateurs de
croissance sont appliqués. Les expérimentations se font avec plusieurs produits
dans le but de trouver un produit qui
s’adapte à chaque zone agro-écologique du pays.
Dans le champ d’expérimentation du
CGM, j’ai apprécié à sa juste valeur, le niveau de professionnalisme dans
lequel cette expérimentation est menée. En effet, toutes les recommandations
techniques sont prises en compte de façon effective. Cela m’a prouvé que les camerounais sont au sérieux
dans ce qu’ils font. À la conférence, toutes les couches de la société
camerounaise étaient représentées : les paysans, les techniciens, les
hommes politiques la société civile et la presse. J’ai été surpris qu’il n’ait
pas d’opposition à l’adoption de la technologie au Cameroun. Les questions
posées étaient relatives au gain réel des producteurs et au prix de la semence.
La bonne collaboration que j’ai
constaté entre la société cotonnière et les producteurs a permis à ce qu’il y’
ait, dans toutes les zones cotonnières, du matériel agricole qui facilite la
production : charrues, semoirs, charrettes, brouettes. Ce matériel est
octroyé aux producteurs. Mais les producteurs camerounais ont interpellé leur
gouvernement sur la cherté de l’engrais. Comme le CGM est un cotonnier qui doit
« bien manger » (bonne fertilisation) pour bien produire, il ne faut
pas que la cherté de l’engrais fasse que les cotonculteurs sous-dosent l’engrais
et empêchent ainsi le cotonnier génétiquement modifié d’exprimer toutes ses
potentialités.
Je conclus en encourageant les
camerounais en leur disant que je les fais confiance car l’Afrique doit
avancer.
Ouagadougou, le 10 novembre 2014
TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa
de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr
Skype:dadilotbf52
(+226) 70 95 34
45
(+226) 78 50 16
25
BURKINA FASO
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire