vendredi 18 juillet 2014

Ce que je pense de la 19e réunion du COS-Coton

J’ai participé en tant que représentant de l’AProCA à la 19e réunion du COS-Coton qui s’est ténue à Bruxelles du 02 au 03 juillet 2014. Il s’agissait essentiellement de faire le bilan des dix ans de partenariat entre l’Union européenne et les pays ACP, et d’examiner l’état des lieux de la mise en œuvre du Programme de consolidation du cadre d’action pour le partenariat UE-Afrique sur le coton. Ce programme vise à contribuer à l’amélioration durable de la compétitivité, de la valeur ajoutée, et de la viabilité des filières cotonnières africaines, de manière à optimiser l’impact sur le revenu des producteurs. Dans ce sens, les principales activités des organisations professionnelles régionales (AProCA, ACA, ACTIF, MoZaZiMa) ont fait l’objet de communications par leurs représentants respectifs. Au cours de la présente réunion du COS-Coton, la question des négociations commerciales sur le coton à l’OMC a été également abordée. Unanimement, l’assemblée a souhaité que ces négociations se poursuivent.

Dans l’agenda de la 19e réunion du COS-Coton, figurait également  la tenue de la 2e réunion du Comité de Pilotage du Programme d’appui à la consolidation du cadre d’action pour le partenariat UE-Afrique sur le coton. L’examen de l’évolution des indicateurs de résultats  (IOV) du Programme a révélé qu’ils sont dans un état de progression satisfaisant dans l’ensemble à la date du 30 juin 2014. En effet, les stratégies régionales coton sont opérationnelles au niveau national et coordonnées en approche panafricaine. Le renforcement des  capacités des associations professionnelles cotonnières en termes de planification et de suivi de mise en œuvre des stratégies est dans une bonne perspective.  En revanche beaucoup d’efforts restent à faire quant à la compétitivité interne et à la viabilité des filières cotonnières africaines. L’amélioration de la productivité, de la qualité du coton et l’accroissement de la valeur ajoutée par l’augmentation de la transformation sur place sont des réceptacles solides pour atteindre ces objectifs.

En tant que représentant de l’AProCA, j’ai suivi avec intérêt les débats sur la transformation du coton. Pour le représentant de la CEDEAO, l’Afrique ne doit pas continuer à produire le coton et à l’exporter.  Le coton africain doit être transformé en Afrique.
En tant que producteur, j’ai également soulevé le problème des intrants agricoles, essentiellement celui de l’engrais. On m’a toujours dit que le problème de la transformation est le travail des sociétés privées. Pourtant, pour moi, l’Afrique est le seul continent dont je sais qu’il a la matière première pour fabriquer l’engrais sur place, mais qui continue à l’importer. La majeure partie de ces matières premières sont exportées vers l’occident pour être transformées, pour, ensuite, revenir en Afrique. C’est l’exemple du phosphate au Togo. J’ai assisté à une rencontre de l’Union africaine à Banjul pendant que  Alpha Omar KONARÉ était à la tête de l’Union. Au cours de ladite réunion, il avait rappelé les chefs d’États africains sur leur engagement, datant depuis 1981, à fabriquer l’engrais pour les producteurs.

Par rapport à cet engrais made in Africa et à la transformation du coton africain, le président du COS-Coton a proposé  de regrouper les acteurs africains en Afrique pour faire une réflexion sur ces deux sujets. Un des participants, tout en étant d’accord avec cette proposition, a dit que pour la transformation du coton africain, il y avait des exemples de pays qui le faisaient déjà (Éthiopie, Ouganda, Afrique du sud,...). Par ailleurs, il pense que la concrétisation de la transformation  du coton africain en Afrique n’est qu’une question  de volonté du politique de chaque pays africain. L’intervention de ce dernier m’a fait penser à  la Tunisie quand j’y étais de passage en 2012. De l’aéroport à l’hôtel, j’ai discuté avec le taximan. Je lui ai posé la question « qu’est-ce qui avait suscité les mouvements ?». Il m’a dit que les raisons principales du soulèvement étaient que l’économie du pays était dans la main de la famille présidentielle. Chaque société privée qui envisageait s’installée dans le pays devait donner 50% de son capital à la famille présidentielle sans qu’elle ne paie un sou.  Cela veut dire que 50% du bénéfice des sociétés privées lui reviennent automatiquement. Voilà un exemple qui existe un peu partout en Afrique et qui empêche le privé de s’installer pour la transformation des produits agricoles africains.

Dans chaque pays africain, un privé qu’il vienne de l’extérieur ou de l’intérieur du pays, s’il veut s’installer, est obligé de faire de la particularité en faveurs des gouvernants. Cela démunie la rentabilité du privé. Souvent les privés ne sont même pas libres dans le recrutement de leur personnel. Ils doivent parfois favoriser les proches des gouvernants alors que, pour être rentable, une société  professionnelle privée  doit avoir une bonne gouvernance en s’appuyant sur de la compétence capable de faire le boulot et d’être rentable. On me dira que dans beaucoup de pays développés ou en voie de développement, il y a aussi des « soudoiements ».  Mais il est évident que si ces pays se développent, c’est que la proportion d’ingérence du politique dans la mise en place et le fonctionnement des entreprises privées est faible. De même, si  dans la transformation des produits agricoles africaines, les gouvernants veulent se remplir les poches individuellement, la population demeurera pauvre et sans emploi. Or, il  y a de la place pour l’installation d’entreprises professionnelles capables de résorber le problème d’emploi des jeunes en Afrique.

Je souhaite que les chefs d’États africains se démarquent de cette façon de faire, pour permettre la promotion et le développement des entreprises privées compétitives et capables de valoriser  qualitativement et durablement les produits agricoles et les ressources naturelles.

Ouagadougou, le 10 juillet 2014

TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr  
Skype:dadilotbf52   
 (+226) 70 95 34 45
 (+226) 78 50 16 25

 BURKINA FASO

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