mardi 3 janvier 2012

Ce que je pense des OXFAM du Mali

Les OXFAM au Mali à la demande des producteurs, se sont mis ensemble pour faire un programme de 5 ans. Dans ce programme, ils ont prévus appuyés l’AProCA, l’AOPP, et le MOBIUM. Ce programme a débuté pendant mon mandat en tant que président de l’AProCA.


Les 08 et 09 décembre, une rencontre du comité d’orientation de ce programme s’est tenue à Bamako. L’actuel président de l’AProCA, Moussa SABALY m’a délégué parce que je maîtrise bien ce dossier pour représenter l’AProCA à cette rencontre du comité d’orientation lors duquel on devrait faire le bilan, tirer les leçons et donner la vision prochaine. La particularité de ce programme est que plusieurs OXFAM ont financé l’appui de plusieurs structures paysannes. Les structures paysannes qu’ils devraient appuyer étaient également de niveaux différentes : l’AProCA qui est une structure africaine des producteurs de coton, l’AOPP, une structure nationale professionnelle de tous les producteurs du Mali au sein de laquelle est représentée toutes les filières de production dont le coton représenté par l’union nationale des sociétés coopératives du Mali et enfin le MOBIUM, structure des producteurs de coton biologique. Les structures accompagnatrices, INDA qui accompagnait l’AProCA dans des axes précis, le SNV qui accompagnait l’AOPP. Au début de ce programme, OXFAM et ces techniciens étaient sérieusement armés de courage pour accompagner les projets des producteurs. Cette coopération de plusieurs partenaires avec différentes structures de producteurs a permis de croire à l’aboutissement d’un esprit de professionnalisme au niveau des producteurs. Mais, lors de la première rencontre, on sentait des difficultés par rapport aux tendances qui se dégageaient. Ces difficultés étaient liées à la différence de niveau des structures des producteurs.

Quand les différents résultats ont été présentés à ce comité, nous avons vu un système et une complémentarité à travers ces structures et ces partenaires. Une des leçons que je tire, est que quand on veut réellement le développement pour les producteurs et si on accepte que les producteurs décident de leur sort, il y a de la place pour tout le monde. Au niveau de l’AProCA, les résultats étaient que l’AProCA et INDA avaient éclairé les plateformes sur leur partenariat vis-à-vis de tous les partenaires dont l’Etat. L’AProCA avait également travaillé à se faire connaître par les grandes institutions au niveau régional et international. L’AProCA, en collaboration par INDA, a commandité une étude sur les OGM au niveau international et a publié les résultats à ses membres. Cela a contribué à les éclairer. Différents systèmes de fixation du prix du coton ont été examinés et mis à la disposition des pays membres de l’AProCA.

Quant à l’AOPP qui est la structure professionnelle de tous les producteurs du Mali, elle a accompagné l’union nationale des sociétés coopératives des producteurs de coton du Mali dès sa naissance. Elle a également accompagné certaines coopératives de l’union pour mener des activités génératrices de revenues particulièrement pour les femmes. Le président de l’AOPP a dit que les femmes des producteurs de coton ont montré que même dans leur situation difficile, elles peuvent être crédibles. Selon lui, quand la femme prend un crédit, elle reste toujours sur place, elle ne bouge pas et fait tout pour rembourser son crédit parce qu’elle est toujours avec ses enfants. Mais lorsque c’est homme, il peut quitter la localité sans avoir payer le crédit. L’AOPP est donc entrain de faire un travail pour que les femmes prennent des postes de décision au sein des coopératives pour permettre d’influencer positivement les hommes pour que ceux-ci profitent de l’expérience des femmes en matière de crédibilité, car leur agriculture est une agriculture familiale, ce qui veut dire l’homme, sa femme et ses enfants. Nous savons que même dans notre histoire malienne, les femmes ont toujours influencé les hommes. Il faut donc nécessairement passer par là pour rendre crédibles les coopératives.

En ce qui concerne MOBIUM, elle a beaucoup travaillé sur la production du coton biologique et également sur d’autres productions biologiques qu’on peut exploiter après le coton biologique comme les céréales, le sésame et le beurre de karité. Nous avons senti une grande complémentarité entre ces structures maliennes qui n’avaient pas forcement la même vision au début du montage du programme mais, qui ont compris à la fin du programme, que c’est dans leur harmonisation que les agriculteurs et agricultrices du Mali pourront se développer. C’est un programme qui a permis également à l’AProCA de suivre et de comprendre au niveau national les activités possibles à mener au niveau des producteurs à la base. Des insuffisances ont cependant été constatées. A titre d’exemple, les changements climatiques étaient un sujet qu’on devrait prendre en compte et sur lequel nous n’avions pas eu suffisamment d’actions.

La vision qui s’est dégagée à la fin de ce comité est de travailler à amener les coopératives dans une vision d’entreprise ; cela veut dire que toutes les structures professionnelles (AProCA), AOPP, UNSCC et MOBIUM) et leurs démembrements doivent comprendre les exigences d’une entreprise depuis leurs exploitations et leur crédibilité dans la coopérative. C’est à ce prix qu’une coopérative peut être viable et entreprenante. Dans cette vision, il est prévu d’attirer le privé à investir et à collaborer avec les coopératives. Cette condition a besoin de vraies coopératives soudées qui peuvent faire des négociations en se basant sur leur crédibilité. Le privé ne fait que du business et a besoin de coopératives qui peuvent lui faciliter ce business. Les coopératives qui ont une vision d’entreprise veulent gagner également parce qu’elles sont ensemble. Le fait qu’elles soient ensemble facilite aussi la tâche au privé. Donc, entre la coopérative et le privé, ça doit être du gagnant-gagnant.

L’Etat doit jouer son rôle qui est de s’assurer que dans les coopératives, l’esprit d’entreprise y est et qu’on ne glisse pas dans les escroqueries de certains groupements ; que les règles de coopératives et d’entreprise soient bien respectés et bannir le mot escroquerie. L’Etat doit également s’assumer en facilitant la tâche au privé. Cela permet au privé sincère de se sentir en sécurité. Il doit aussi éviter la politisation négative du privé, mener à bien les tâches qui lui sont assignées : le désenclavement, l’énergie et la communication. C’est à ce prix que les agriculteurs peuvent gagner leur vie, qu’on pourra limiter l’exode rural et que l’Afrique pourra émerger. Ce programme dans ma tête reste « un programme école ».

Enfin, mon souhait est que de telles initiatives continuent. En effet, à travers ce programme nous avons tracé un itinéraire qui doit être suivi.



                                         Ouagadougou, le 17 décembre 2012

                                         TRAORE B. François,

                                         http://www.francoistraore.blogspot.com/

                                         Président d’honneur de l’AProCA,

                                         Docteur honoris causa de l’université
                                         de GEMBLOUX.

                                          (+226) 70 95 34 45

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