Du 14 au 15 mars 2013, la caisse populaire
a organisé un atelier d’échanges avec les organisations de producteurs. Les
objectifs étaient que la caisse population fasse comprendre aux agriculteurs
ses règles et ses principes ; que les agriculteurs disent leurs
préoccupations par rapport à la collaboration caisse populaire organisation
paysanne pour que l’outil crédit et épargne se fasse bien entre les deux
entités et que leur collaboration soit du gagnant gagnant.
A l’atelier, les agriculteurs ont apprécié
positivement la collaboration de la caisse populaire qu’ils appellent
d’ailleurs une caisse de proximité. Tous les membres du conseil sont constitués
par les adhérents. Cela fait de la caisse leur propriété. Selon les producteurs
de coton, la caisse populaire a contribué à faire baisser le taux
d’intérêt du crédit de 11 à 8,%. La Fédération des Professionnels Agricoles du
Burkina (FEPABE) comme l’UGCPA qui fait la commercialisation des céréales en
faisant le crédit des intrants ont également bénéficié de cette largesse de la
caisse populaire. L’UNPCB a félicité la caisse d’avoir plus de 45 milliards de
francs cfa dans la production. Cela a permis à la filière de d’augmenter sa
production.
Les producteurs ont proposés à la caisse
populaire d’adoucir les procédures d’obtention du crédit et de baisser le taux
d’intérêt. La caisse à son tour a
demandé aux producteurs une meilleure organisation qui non seulement augmente
leur crédibilité mais qui diminue aussi le risque de non remboursement du
crédit. Pour la caisse, l’argent qu’elle détient appartient aux adhérents. Ce
qui fait qu’elle est obligée de travailler et de se rassurer de son remboursement.
La crédibilité d’une organisation est
avantageuse pour l’organisation et pour la banque. Selon la caisse, elle est là
pour accompagner le développement. Elle s’engage à revoir ses procédures mais
souhaite que les paysans respectent les principes organitionnels afin que cette
collaboration continue à être gagnante gagnante.
Cette rencontre et ces réflexions
témoignent de l’intérêt d’avoir un leadership efficace. J’appelle tous les
producteurs, les partenaires à ce que les organisations agricoles aient des
leaders conscients de leur rôle à jouer pour entraîner les membres au développement.
La réussite et la survie des organisations en dépendent.
J’ai participé à cet atelier en tant que
personne et voici ma réflexion ci-dessous.
Ce que je pense des relations entre
l’agriculteur, son organisation et les structures financières pour le développement
de l’agriculture.
L’agriculture
est le plus vieux métier au monde. Depuis que l’homme a décidé de ne plus se
nourrir seulement par cueillette dans la
nature, il a sélectionné des produits qu’il pense bon pour sa consommation, son
épanouissement et a décidé de les entretenir pour s’auto-suffire. Cela lui a exigé
un investissement personnel. L’homme a donc fait violence sur lui-même pour
avoir fait ce choix. Mon père m’a expliqué la manière dont les activités
agricoles se menaient dans leur famille. Au Burkina, de façon générale l’agriculture a été pratiquée par de grandes
familles et cela nécessitait une organisation. Ce sont les personnes d’expérience
d’un certain âge qui faisaient le choix des terrains et le choix des espèces de
cultures. Ces personnes guidaient les jeunes qui avaient la force physique pour
la réussite de ce métier.
Quand il y avait une concordance entre les
personnes âgées et les jeunes, les étaient abondant. C’est avec cette abondance
qu’ils ont créé des unités de transformation (le dolo, le beurre de karité, le
soumbala, la filature et le tissage du coton...). En plus de cela, ils ont inventé
les marchés hebdomadaires pour écouler le surplus de leurs produits. Dans
chaque village, il avait un artisan qui fabriquait les outils de travail
(forgerons, tisserands, griots,..). Donc, nos ancêtres par rapport à leur
époque ont chaque fois trouvé la solution à leurs problèmes.
Dans
l’esprit de modernisation de cette agriculture et avec les besoins que nous
avons de nos jours, l’obligation nous est faite dans ce métier agricole de
travailler à combler tous ces besoins : se soigner, se nourrir, s’éduquer,
s’habiller, s’abriter. Cela exige de nous également une violence sur soi. C’est ainsi que l’organisation
familiale seule ne suffisait plus. Il fallait créer des organisations, les
associations, les groupements, les coopératives villageois. La raison de cette
structuration était de s’associer pour avoir les intrants agricoles (matériel
agricole, semence, engrais, investissements…) que de nombreux paysans pris
individuellement ne pouvaient pas s’en acquérir.
Cette
structuration a marqué le début du crédit dans l’agriculture. Ce crédit a
toujours été l’objet de financement des institutions financières. Les institutions financières ont de l’argent déposé
par des clients et c’est dans la fluctuation de cet argent que ces institutions
fonctionnent. Elles peuvent le prêter moyennant des intérêts remboursables
après la vente des récoltes. Cela à amener les organisations paysannes à mieux
comprendre le crédit et à mener des
actions de commercialiser afin de payer ses crédits et avoir des revenus. Dans ma vie, j’ai bénéficié d’un crédit
individuel et d’un autre à travers une organisation dans laquelle nous faisions
la commercialisation. Le remboursement de ces crédits est noble pour moi, car je
sais que l’argent de la banque appartient à des clients qu’elle me prête. Donc,
j’ai l’obligation de le rendre pour le reprendre à tout moment que le besoin se
fiat sentir. La banque ayant été intermédiaire pour que j’obtienne ce crédit,
le respect de mon engagement à payer le crédit et ses intérêts permet à cette
banque d’exister pour continuer à financer le secteur. Cela veut dire que par rapport à l’agriculteur et son organisation,
seulement la crédibilité peut permettre de pérenniser cette relation. La crédibilité
d’un individu s’obtient par un comportement responsable.
Il
m’est arrivé de dire à mon fils que s’il prend un crédit, le montant de ce crédit doit être permanemment
dans sa tête pour que cela influence son comportement quotidien. Quand tu dois
à quelqu’un, les heures de travail que tu utilisais doivent être revues à la hausse et cela pendant les 365 jours. En 1986, j’ai obtenu mon premier tracteur à crédit
après un apport personnel. Je devais payer les annuités pendant 6 ans. Le crédit des annuités et celui des intrants, pouvait
m’amener à payer près de 3 à 4 millions par an. J’ai pu tout rembourser pendant
les 6 ans et même payer un autre tracteur de seconde main au comptant avant de
finir de payer ce crédit. Et cela parce qu’après avoir payé mon crédit chaque
année, j’épargnais le reste de mon argent dans les structures financières.
C’est cette somme épargnée qui ma permis de payer le nouveau tracteur.
Quant
à la crédibilité d’une organisation paysanne, cela s’acquiert par le souci de
cette organisation qu’il y ait un contact permanent être ses membres pour étudier
la capacité de chacun et un contact permanant pour le suivi du crédit de
chacun. Pour moi pour qu’une organisation au village qui prend du crédit
fonctionne bien, elle doit tenir une
rencontre tous les deux semaines. Dans ces rencontres, les membres doivent avoir le courage de se
dire les choses comme elles sont. Dans une organisation, il ne doit pas y avoir
de supers hommes. Elle doit
simplement avoir des hommes qui respectent leur parole.
L’esprit
de solidarité organique dans la réflexion doit régner. Dans mon expérience,
j’ai fait le groupement villageois de Sogodiankoli dans les Banwa de 1982 à 1996.
Mon groupement villageois n’a eu aucun problème avec les partenaires en matière
de crédit dans le secteur coton. Nous avons même construit nous même notre école
primaire et l’équiper de tables bancs au comptant avec l’argent épargné dans
les banques. De 1996 à nos jours, nous avons créé les Groupements de
producteurs de Coton (GPC). Mon GPC s’appelle Bolibana. Dans tout groupement
dans lequel j’ai été, nous n’avons jamais reporté un crédit, nous avons
toujours remboursé nos dettes et verser aux producteurs leur revenus.
Donc
de 1982 à nos jours, je peux affirmer haut et fort que le crédit est un outil
de développement lorsqu’il est bien conçu et bien géré. Dans nos groupements, nous avons eu la preuve que les bonnes relations
entre une institution financière, l’agriculteur
et son organisation, peuvent être gagnant gagnants.
Ouagadougou, le 20 avril 2013
TRAORE B. François,
www.francoistraore.blogspot.com
Président
d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25
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