dimanche 21 avril 2013

Ce que je pense de l’orpaillage clandestin


Ces dernières années, l’orpaillage clandestin a pris de l’ampleur en Afrique de l’ouest. Dans ces sites d’orpaillage, on y trouve des enfants de 7 à 12 ans. La majorité de ces enfants sont des enfants qui ont déserté l’école pour aller dans les sites d’orpaillage. Cela me fait réfléchir parce qu’il nous arrive souvent d’entendre parler de travail des enfants en Afrique. Ce sont les exploitations agricoles qui sont souvent indexées.
En réponse à cette interpellation des agriculteurs, il m’est arrivé de dire que l’agriculture dans une famille, est une école dans laquelle commence une partie de la formation de l’enfant. C’est ce qui fait que même étant allé à l’école, certains jeunes n’ont pas de problèmes à revenir vers la terre parce qu’ils y sont initiés. Mieux ne dit-on pas souvent qu’il y a inadéquation entre le système économique africain et le système éducatif ? Alors que  dans les sites d’orpaillage, rares sont les enfants qui y vont avec le consentement de leurs parents. Si les parents ont consenti, la raison ne peut être que l’extrême pauvreté. C’est pourquoi j’ai toujours dit qu’il est mieux de combattre la pauvreté à sa racine pour que les familles puissent mieux s’occuper de leurs enfants, que de combattre sa conséquence qui est le travail des enfants.
Ces enfants qui sont sur ces sites d’orpaillage, quand on leur pose la question pourquoi ils sont là, l’objectif n’est jamais cadré. Ils ont décidé seuls d’y aller et s’il leur arrive d’avoir de l’argent dans ces sites, ils ne font que ce qu’ils voient faire. Si les gens consomment la drogue ils vont la consommer ; s’ils voient les gens prendre de l’alcool, ils vont en prendre. Hormis les risques d’éboulement possible dans le travail d’orpaillage, ils reviennent majoritairement malades.
La lutte contre la pauvreté ne doit pas être de farce. Elle doit se sentir dans l’éducation, dans la formation et dans la vision. Dans les années 2000 pendant qu’on luttait contre les subventions internationales sur le coton, il m’est arrivé de dire à un journaliste que si le prix du coton restait si bas, qu’il était possible de retrouver des producteurs de coton parmi les terroristes. En 2013, parmi les prisonniers de guerre du Mali, il y a toutes les nationalités de la sous région. Il y a donc la possibilité de trouver des producteurs de coton parmi eux.
Ainsi par effet d’entrainement, les jeunes agriculteurs, quand ils quittent le milieu rural, ils vont dans les villes et prennent la place qu’occupent les jeunes chômeurs de la ville en se faisant payer à moitié prix. Ces jeunes chômeurs des villes se trouvent ainsi obligé d’aller vers l’occident. Dans cette traversée du désert, ils peuvent se faire recrutés par des terroristes et des trafiquants de drogue.
Nous savons tous que le commerce de la drogue et le terrorisme se font par les hommes très riches utilisant les hommes très pauvres. Celui qui détient l’argent manipule comme il veut celui qui est pauvre et qui est dans une situation difficile. Cela finit par être un problème mondial. Je trouve donc que l’Afrique et ses partenaires ont intérêt à combattre réellement la pauvreté dans sa racine.
Ouagadougou, le 21 avril 2013
TRAORE B. François,
 www.francoistraore.blogspot.com                                                                                          
 Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25

samedi 20 avril 2013

Ce que je pense des caisses populaires

Du 14 au 15 mars 2013, la caisse populaire a organisé un atelier d’échanges avec les organisations de producteurs. Les objectifs étaient que la caisse population fasse comprendre aux agriculteurs ses règles et ses principes ; que les agriculteurs disent leurs préoccupations par rapport à la collaboration caisse populaire organisation paysanne pour que l’outil crédit et épargne se fasse bien entre les deux entités et que leur collaboration soit du gagnant gagnant.

A l’atelier, les agriculteurs ont apprécié positivement la collaboration de la caisse populaire qu’ils appellent d’ailleurs une caisse de proximité. Tous les membres du conseil sont constitués par les adhérents. Cela fait de la caisse leur propriété. Selon les producteurs de coton, la caisse populaire a contribué à faire  baisser le taux d’intérêt du crédit de 11 à 8,%. La Fédération des Professionnels Agricoles du Burkina (FEPABE) comme l’UGCPA qui fait la commercialisation des céréales en faisant le crédit des intrants ont également bénéficié de cette largesse de la caisse populaire. L’UNPCB a félicité la caisse d’avoir plus de 45 milliards de francs cfa dans la production. Cela a permis à la filière de d’augmenter sa production.

Les producteurs ont proposés à la caisse populaire d’adoucir les procédures d’obtention du crédit et de baisser le taux d’intérêt. La caisse à son tour a demandé aux producteurs une meilleure organisation qui non seulement augmente leur crédibilité mais qui diminue aussi le risque de non remboursement du crédit. Pour la caisse, l’argent qu’elle détient appartient aux adhérents. Ce qui fait qu’elle est obligée de travailler et de se rassurer de son remboursement.

La crédibilité d’une organisation est avantageuse pour l’organisation et pour la banque. Selon la caisse, elle est là pour accompagner le développement. Elle s’engage à revoir ses procédures mais souhaite que les paysans respectent les principes organitionnels afin que cette collaboration continue à être gagnante gagnante.

Cette rencontre et ces réflexions témoignent de l’intérêt d’avoir un leadership efficace. J’appelle tous les producteurs, les partenaires à ce que les organisations agricoles aient des leaders conscients de leur rôle à jouer pour entraîner les membres au développement. La réussite et la survie des organisations en dépendent.
J’ai participé à cet atelier en tant que personne et voici ma réflexion ci-dessous.


Ce que je pense des relations entre l’agriculteur, son organisation et les structures financières pour le développement de l’agriculture.
L’agriculture est le plus vieux métier au monde. Depuis que l’homme a décidé de ne plus se nourrir seulement par cueillette dans  la nature, il a sélectionné des produits qu’il pense bon pour sa consommation, son épanouissement et a décidé de les entretenir pour s’auto-suffire. Cela lui a exigé un investissement personnel. L’homme a donc fait violence sur lui-même pour avoir fait ce choix. Mon père m’a expliqué la manière dont les activités agricoles se menaient dans leur famille. Au Burkina, de façon générale  l’agriculture a été pratiquée par de grandes familles et cela nécessitait une organisation. Ce sont les personnes d’expérience d’un certain âge qui faisaient le choix des terrains et le choix des espèces de cultures. Ces personnes guidaient les jeunes qui avaient la force physique pour la réussite de ce métier.
 Quand il y avait une concordance entre les personnes âgées et les jeunes, les étaient abondant. C’est avec cette abondance qu’ils ont créé des unités de transformation (le dolo, le beurre de karité, le soumbala, la filature et le tissage du coton...). En plus de cela, ils ont inventé les marchés hebdomadaires pour écouler le surplus de leurs produits. Dans chaque village, il avait un artisan qui fabriquait les outils de travail (forgerons, tisserands, griots,..). Donc, nos ancêtres par rapport à leur époque ont chaque fois trouvé la solution à leurs problèmes.
Dans l’esprit de modernisation de cette agriculture et avec les besoins que nous avons de nos jours, l’obligation nous est faite dans ce métier agricole de travailler à combler tous ces besoins : se soigner, se nourrir, s’éduquer, s’habiller, s’abriter. Cela exige de nous également une  violence sur soi. C’est ainsi que l’organisation familiale seule ne suffisait plus. Il fallait créer des organisations, les associations, les groupements, les coopératives villageois. La raison de cette structuration était de s’associer pour avoir les intrants agricoles (matériel agricole, semence, engrais, investissements…) que de nombreux paysans pris individuellement ne pouvaient pas s’en acquérir.
Cette structuration a marqué le début du crédit dans l’agriculture. Ce crédit a toujours été l’objet de financement des institutions financières.  Les institutions financières ont de l’argent déposé par des clients et c’est dans la fluctuation de cet argent que ces institutions fonctionnent. Elles peuvent le prêter moyennant des intérêts remboursables après la vente des récoltes. Cela à amener les organisations paysannes à mieux comprendre  le crédit et à mener des actions de commercialiser afin de payer ses crédits et avoir des revenus.  Dans ma vie, j’ai bénéficié d’un crédit individuel et d’un autre à travers une organisation dans laquelle nous faisions la commercialisation. Le remboursement de ces crédits est noble pour moi, car je sais que l’argent de la banque appartient à des clients qu’elle me prête. Donc, j’ai l’obligation de le rendre pour le reprendre à tout moment que le besoin se fiat sentir. La banque ayant été intermédiaire pour que j’obtienne ce crédit, le respect de mon engagement à payer le crédit et ses intérêts permet à cette banque d’exister pour continuer à financer le secteur. Cela veut dire que  par rapport à l’agriculteur et son organisation, seulement la crédibilité peut permettre de pérenniser cette relation. La crédibilité d’un individu s’obtient par un comportement responsable.
Il m’est arrivé de dire à mon fils que s’il prend un  crédit, le montant de ce crédit doit être permanemment dans sa tête pour que cela influence son comportement quotidien. Quand tu dois à quelqu’un, les heures de travail que tu utilisais doivent être revues  à la  hausse et cela pendant les 365 jours.  En 1986, j’ai obtenu mon premier tracteur à crédit après un apport personnel. Je devais payer les annuités pendant 6 ans.  Le crédit des annuités et celui des intrants, pouvait m’amener à payer près de 3 à 4 millions par an. J’ai pu tout rembourser pendant les 6 ans et même payer un autre tracteur de seconde main au comptant avant de finir de payer ce crédit. Et cela parce qu’après avoir payé mon crédit chaque année, j’épargnais le reste de mon argent dans les structures financières. C’est cette somme épargnée qui ma permis de payer le nouveau tracteur.
Quant à la crédibilité d’une organisation paysanne, cela s’acquiert par le souci de cette organisation qu’il y ait un contact permanent être ses membres pour étudier la capacité de chacun et un contact permanant pour le suivi du crédit de chacun. Pour moi pour qu’une organisation au village qui prend du crédit fonctionne bien, elle  doit tenir une rencontre tous les deux semaines. Dans ces rencontres,  les membres doivent avoir le courage de se dire les choses comme elles sont. Dans une organisation, il ne doit pas y avoir de supers hommes. Elle doit simplement avoir des hommes qui respectent leur parole.
L’esprit de solidarité organique dans la réflexion doit régner. Dans mon expérience, j’ai fait le groupement villageois de Sogodiankoli dans les Banwa de 1982 à 1996. Mon groupement villageois n’a eu aucun problème avec les partenaires en matière de crédit dans le secteur coton. Nous avons même construit nous même notre école primaire et l’équiper de tables bancs au comptant avec l’argent épargné dans les banques. De 1996 à nos jours, nous avons créé les Groupements de producteurs de Coton (GPC). Mon GPC s’appelle Bolibana. Dans tout groupement dans lequel j’ai été, nous n’avons jamais reporté un crédit, nous avons toujours remboursé nos dettes et verser aux producteurs leur revenus.
Donc de 1982 à nos jours, je peux affirmer haut et fort que le crédit est un outil de développement lorsqu’il est bien conçu et bien géré. Dans nos groupements,  nous avons eu la preuve que les bonnes relations entre une  institution financière, l’agriculteur et son organisation, peuvent être gagnant gagnants.

Ouagadougou, le 20 avril 2013
TRAORE B. François,
 www.francoistraore.blogspot.com                                                                                          
 Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25

lundi 15 avril 2013

Ce que je pense de PR-PICA


Du 25 au 26 février 2013, j’ai été invité par le PR-PICA comme personne ressource, ancien président de l’AProCA,   à la conférence sur la lutte intégrée contre les ravageurs du cotonnier en Afrique. L’objectif global de la conférence était  de favoriser le partage d’expériences en matière de lutte intégrée (acquis et perspectives) contre les ravageurs en vue de contribuer de façon durable à l’amélioration de la productivité et de la qualité du coton en Afrique de l'Ouest et du Centre.
Cette conférence financée par la Commission de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) a connu la participation des représentants des sociétés cotonnières, des organisations interprofessionnelles, des structures de recherche et des Organisations de Producteurs de Coton des pays membres du PR-PICA (Bénin, Burkina Faso, Mali, Sénégal, Côte d’Ivoire et Togo), de la Guinée, du Cameroun et de l’UEMOA.
Ont pris part également aux travaux, les représentants des Firmes Agro-pharmaceutiques, des structures techniques du Ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural de la République du Sénégal, de l’Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA) et des chercheurs intervenants sur le niébé, les cultures maraichères, les mangues et des agrumes.
Après l’ouverture de cette conférence,  l’assemblée a échangé sur les thèmes suivants :
ü  Lutte intégrée contre les ravageurs du cotonnier, vulgarisée en Afrique de l’Ouest :
contributions, enjeux et perspectives ;
ü  Lutte chimique raisonnée contre les ravageurs du cotonnier en Afrique de l’Ouest ;
ü  La lutte intégrée contre les ravageurs du cotonnier au Tchad ;
ü  Expérience de lutte intégrée contre les insectes ravageurs du niébé en Afrique de l’Ouest ;
ü  La lutte intégrée contre les ravageurs de la mangue et des agrumes en Afrique de l’Ouest ;
ü  La lutte intégrée contre les ravageurs des cultures maraichères en Afrique de l’ouest ;
ü  Place du cotonnier génétiquement modifié (CGM) dans la lutte intégrée contre
les ravageurs du cotonnier, expérience du Burkina.
 Au Burkina, environ 56% du coton cultivé en 2012 est CGM. Il y a donc plus de 380 000 tonnes de CGM sur environ 600 000 tonnes de coton pour la campagne 2012-2013. Selon les paysans qui l’on produit, si on arrête le CGM, ils arrêteront la production du coton.
Les échanges sur ces thèmes ont permis de mettre en exergue les acquis, les défis et les perspectives en matière de lutte intégrée contre les ravageurs du cotonnier et des cultures maraichères en Afrique de l’ouest.

Au regard des défis et des perspectives, les participants ont formulé les recommandations suivantes:
ü  Renforcer les capacités au niveau de la recherche, du développement et des producteurs sur les acquis de la lutte intégrée ;
ü  Elaborer des outils de vulgarisation des innovations disponibles au niveau des
acquis du PR-PICA et des autres cultures;
ü  Elargir le PR-PICA à l’ensemble des autres disciplines de la production cotonnière

En tant que producteur, j’ai toujours soutenue l’initiative du PR-PICA. Il s’agit d’acteurs du coton africain qui ont décidé de réfléchir ensemble pour la destiné du coton en matière de parasitisme. Les américains et les indiens font la même chose pour mieux décider. Le monde est devenu un village ; les acquis des uns peuvent aider les autres dans le partage mais ce qui est sûr, c’est qu’il faut s’approprier  des expériences des autres car les acteurs du PR-PICA sont tous nés dans le coton.
Pour certains, le coton a payé leurs études, s’ils deviennent docteurs aujourd’hui, ce n’est pas leur doctorat que la population va manger, c’est plutôt le service rendu dans un esprit professionnel et patriote que bénéficie la population. Ce sont des structures de ce genre que les gouvernements et les partenaires doivent écouter  et accompagner. Nul ne doit être le détenteur de la destinée de l’autre.
Je crois au coton africain et l’agriculture africaine dans cette façon de faire.
  
Ouagadougou, le 31 mars 2013
TRAORE B. François,
 www.francoistraore.blogspot.com                                                                                          
 Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25

dimanche 14 avril 2013

Ce que je pense du partenariat entre l’AProCA et l’UEMOA


Dans l’esprit de l’initiative coton, sur appui de l’Union Européenne, l’Association des Producteurs de Coton Africains (AProCA) a reçu un financement de l’UEMOA qui a servi à financer les formations sur l’Université du Coton (UdC). L’AProCA après sa création, a fait  un plan d’action dont l’essentiel était axé sur la formation continue de tous ceux qui travaillent dans le secteur coton. L’AProCA avait compris que malgré sa lutte contre les subventions, que la filière cotonnière avait des efforts à faire dans l’organisation et dans l’acquisition de capacités professionnelles des acteurs. C’est ainsi que l’Université Polytechnique de Bobo (l’UPB) a été choisie comme siège de l’université du coton. En collaboration avec les autres universités des pays membres de l’AProCA, L’UPB a organisé ces différentes sessions de formation et pour accompagner les acteurs dans leur vision. Pour certains à l’époque, cette initiative n’avait pas de sens.
Selon eux, les producteurs n’avaient pas les connaissances suffisantes pour comprendre les professeurs d’université ; pour eux les agents des sociétés cotonnières sont tous passés par les universités avant d’être employés, ils n’ont donc pas besoins de ces formations. D’autres ne savaient pas non plus le plus que ces formations pouvaient apporter. Ils ignoraient certes la valeur de la formation continue et la nourriture du capital humain pour être efficace et efficient. Alors que les producteurs et les sociétés cotonnières étaient déjà dans l’action. Dans les universités, on parle des actions passées et des actions possibles futures. Donc pour nous l’université du coton était belle et bien bénéfique pour les acteurs sur le terrain et bénéfique pour les universités africaines parce qu’elles seront en contact direct avec des acteurs.
Dans cet esprit une « formation » pour les professeurs de l’université du coton s’est tenue à Bamako. Quelqu’un nous dira comment nous, nous pouvons imaginer formez des professeurs ? Cette formation à pourtant permis à ce que les professeurs harmonisent leurs méthodes de transmission du savoir et d’approches dans le milieu des acteurs en fonction. Cela a été aussi une occasion pour les professeurs d’écouter les producteurs dans leur vision de collaboration souhaitée entre eux et leurs partenaires, les sociétés cotonnières et l’Etat. Cela a été l’occasion de mesurer la portée de lier la théorie à la pratique et vice versa.
Par là, nous nous disons que le développement de l’Afrique passera forcement par le fait que  les penseurs éducateurs éduquent et enseignent dans le sens de la résolution des problèmes des acteurs dans leurs métiers. Cette formation a permis également de faciliter les autres formations. C’est ainsi qu’a eu lieu à Douala au Cameroun la formation des cadres des sociétés cotonnières à laquelle ont pris part quelques producteurs membres de l’AProCA pour partager leurs expériences avec ces cadres.
   

  

                                                              Photo des participants à la formation de Douala

Ces cadres sont la plupart chargés dans les différents services des sociétés cotonnières, de former et d’encadrer les agriculteurs sur les différents itinéraires techniques de la production cotonnière; de former également dans l’esprit coopératif et des techniques pour mieux communiquer.

                                                                           Photo des trois facilitateurs 

A la fin de cette formation de Douala, j’ai compris que, passé le temps pendant plusieurs années à dire que les producteurs ne respectent pas l’itinéraire technique, ne nous faisait pas avancé. Il faut revoir la méthode qu’on a utilisée pendant longtemps, changer le message et les mentalités de part et d’autres. Le rôle d’un formateur, c’est de changer des habitudes négatives, d’amener à briser les paradigmes. C’est le plus qu’il peut apporter. Le formateur n’est utile que lorsqu’il arrive à faire revenir un producteur à la raison.
Une autre formation s’est tenue à Ouagadougou, elle concernait les dirigeants des structures  des producteurs membres de l’AProCA et leurs techniciens accompagnateurs. Cette formation s’est basée sur l’organisation, commercialisation et recherche des marchés, l’esprit coopératif, les difficultés qui font que les rendements baissent, la gestion des conflits dans les organisations...
A la fin de cette formation, ma compréhension pour un dirigeant, c’est d’être utile, de se préoccuper du bien être de l’agriculteur à travers l’accompagnement de ses efforts. Pour bien accompagner les efforts de l’agriculteur, il faut que les agriculteurs soient bien conscients. Donc, un dirigeant doit être exemplaire, un modèle de producteur. Ainsi, il se fera respecter par ceux qui l’on élu et se faire écouter par ses partenaires également.
Une quatrième formation a concerné les chefs de services formateurs des sociétés cotonnières et des chefs de services formateurs des structures de producteurs de coton plus quelques dirigeants producteurs à Cotonou. A cette formation la qualité de la formation, l’identification des besoins de formation, le management, l'andragogie, les techniques de communication, les techniques de rédaction des termes de références et gestion des dossiers d’appel d’offre ont été fortement discutés. En plus des questions transversales ont été débattues. D'autre part, la prise de conscience de l’identification des besoins de formation réelles, et celui de l’itinéraire technique ont été capitales. Il a été reconnu que la composition de l’engrais préconisé n’est pas souvent adaptée à la terre ; à cause de la crise de la filière dans les années passées, les sociétés se sont souvent contentées des compositions standards qui ne permettent pas un amendement cohérent sur certaines terres. Alors continuer à dire à un producteur qu’il ne respecte pas les itinéraires techniques, n’est pas forcement le problème.
En conclusion, ces formations ont démontré qu’une réflexion approfondie dans chaque filière pour un changement de comportement, de mentalité de chaque acteur dans les filières est nécessaire. L’UdC, si elle n’existait pas, elle devrait être créée. Permettre à des acteurs de pays différents et de sociétés différentes de discuter des mêmes problèmes et d’échanger sur leurs expériences a été salutaire. Voilà l’intérêt de l’université du coton qui a aussi permis aux professeurs de ces universités d’avoir l’occasion de mettre leurs savoirs pédagogiques au service des acteurs et de prendre aussi en compte les savoirs paysans.
Les débats que ces professeurs d’université ont suscité entre les acteurs leur permettent désormais d’utiliser ces informations dans les universités. Cela fait que dorénavant, les professeurs pour certains exemples, ne vont pas amener les étudiants à se plonger dans les livres ou à n’aller que sur internet ; ils peuvent désormais mieux orienter leurs étudiants vers les acteurs de terrain. C’est cette cohérence qui fera faire bouger la machine économique africaine un jour.
C’est l’occasion pour moi de dire merci à l’UEMOA et ses partenaires de l’UE; de leur dire qu’ils ont fait une bonne œuvre dans laquelle je souhaite une continuité. Je souhaite que d’autres partenaires emboîtent leur pas en entendant que les différentes filières puissent s’autofinancer pour ces genres de formations pour un capital humain digne de ce nom.
Ouagadougou, le 13 avril 2013
TRAORE B. François,
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lundi 1 avril 2013

Ce que je pense de la décentralisation du pouvoir en Afrique


Après la colonisation, il y a eu les indépendances en Afrique. Cela a donné un pouvoir central qui a gouverné nos pays alors que dans la tradition africaine les pouvoirs centraux n’étaient pas basés sur les pays, mais basé sur un rayon qui pouvait s’élargir.  Ces pouvoirs centraux étaient réservés aux chefs, aux rois ou aux chefs de guerre. Il y a même des régions qui n’avaient pas de pouvoir central. Mais le pouvoir par localité existait partout. Il pouvait être exercé par des chefs de village ou des chefs de clans.
Les dirigeants étaient choisis soit par consensus, soit par désignation selon les sages ou par héritage. Des règles existaient et dans l’organisation on faisait de telle sorte que tout le monde maîtrise ces règles. Pour cela, les initiations étaient faites pour former les gens par générations.  La violation de ces règles par un individu pouvait le conduire à des sanctions comme le paiement d’une amende, le bannissement ou la  mort. Cette pratique s’apparentait à une grande rigueur pourtant comprise à l’époque par tout le monde.
Les erreurs étaient des grands événements pour la famille de celui qui a commis l’erreur et c’est toute la famille qui était déçue. Chaque membre de la communauté devait avoir le patriotisme dans ses actions. Il y avait des cérémonies pour rendre gloire à ceux qui avaient fait de grandes innovations pour l’avancée de leur communauté. Les griots qui étaient les communicateurs devaient le proclamer en public. Ces gloires étaient   toujours chantées à la descendance de ces personnes leaders.

Il y a eu donc une rupture après les indépendances qui n’a pas permis de moderniser cette discipline. Nos sociétés étaient donc déboussolées. C’est dans ce contexte que naît  le vent de décentralisation. Je pense qu’il y a une grande dissemblance  entre ce qui était le pouvoir dans les localités et ce qu’on appelle la décentralisation aujourd’hui. Dans cette décentralisation, on doit se faire élire dans sa localité en étant membre d’un parti politique. C’est le parti qui vient expliquer sa philosophie au village. Du coup la localité peut penser que sa destinée n’est que dans la main du parti.

Alors que dans ma compréhension de la décentralisation, votre destinée est dans vos mains. L’ayant vu par exemple dans la région de la Bretagne en France, où ce sont les ressortissants de la Bretagne travaillant hors de la Bretagne et ceux qui y vivent qui se sont donnés la main pour développer leur région.  Ce qui a permis de créer une forte cohésion pour lutter contre la pauvreté et pour le développement. Or en Afrique, nous avons souvent vu dans cette décentralisation que l’opposition entre les partis crée de la mésentente au sien les populations dans la localité. Il arrive que cette mésentente soit entre des gens issus d’un même parti dans la localité.On me dira que c’est ça la démocratie. Mais cette démocratie, c’est pour quoi faire ? S’il y avait toujours les sanctions de nos ancêtres, est-ce que certains allaient finir leur mandat?
Au Burkina Faso, en 2012, il y a eu des élections dans l’esprit de la décentralisation. En tant qu’agriculteurs, nous nos problèmes sont les mêmes : changement climatique, mauvaise pluviométrie, problèmes d’intrants et commercialisation. Notre développement n’est possible que dans l’esprit coopératif.

Hors les bonnes coopératives ne peuvent pas être créées et être fonctionnelles si des tensions existent dans notre environnement. Je lance un appel à tous les hommes politiques pour leur dire qu’ils ont un devoir vis à vis des populations à la base.  Ils doivent développer des idées allant dans le sens de la consolidation de la cohésion. Cela veut dire « vouloir le pouvoir pour l’intérêt et l’épanouissement de ta localité ».

Ouagadougou, le 31 mars 2013
TRAORE B. François,
 www.francoistraore.blogspot.com                                                                                                                        
 Président d’honneur de l’AProCA,
Docteur honoris causa.
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25