Le 19 avril 2015, j’ai
accompagné le 1er vice-président du Mouvement du Peuple pour le
Progrès (MPP) Salif Diallo, en tant que 2ème vice-président de
la commission chargée du développement rural pour une rencontre de partage
d’informations avec les militants MPP. Avant la rencontre avec la population,
j’ai eu l’occasion de faire une visite dans la zone aménagée et le constat que
j’ai fait, est que tous les agriculteurs se plaignaient de la manière dont ils
sont gérés dans la plaine irriguée. Pendant ma visite, un paysan m’a montré une
surface de la zone aménagée de plus de cent (100) hectares qui appartient à un
ex-ministre non exploitée totalement. Le paysan me dit que pendant ce temps,
eux ils ne disposent que d’un (1) hectare par famille. Il ajoute que pourtant
dans sa famille, ils sont plus d’une dizaine de personnes valides. Donc, un
hectare ne leur suffit pas.
Je me suis ensuite
rendu dans la zone aménagée pour la pisciculture, les aménagements
que j’y ai vus sont nettement supérieurs en qualité à ceux du Centre Songhaï au
Benin qui est pour un privé. En outre, l’investissement à la pisciculture du
Centre Songhaï ne vaut pas le centième de celui de Bagré et les investissements
de Bagré ne sont plus utilisés à 5%. Pourtant les paysans me disent que quand
les chinois y étaient, tout fonctionnait normalement. Le Centre Songhaï au
Bénin est pour un africain, cette pisciculture marche très bien dans ce Centre
et est très rentable. Ce qui veut dire que ce n’est pas seulement les chinois
qui savent faire les bonnes choses.
La rencontre politique
avec le 1er vice-président s’est tenue dans l’après-midi. Les
paysans lui ont d’abord rappelé ses bienfaits lorsqu’il était ministre de
l’agriculture et à titre d’exemple ils ont dit : « les villageois de
Bagré n’avaient pas accès au courant fourni par le barrage et c’est pendant un
de ses passages qu’il a donné l’ordre de résoudre ce problème et il fut résolu.
Par ailleurs, ce même jour, il a interpelé par téléphone un commerçant de
Ouagadougou qui traînait à payer le riz des agriculteurs qu’il avait acheté.
Celui-ci s’est exécuté aussitôt. Ils ont également dit que quand il était
ministre de l’agriculture, les paysans de Bagré étaient parmi les premiers à
bénéficier de l’engrais subventionné de l’État burkinabé. Après lui, ils n’ont
plus eu accès à cet engrais subventionné ».
Les agriculteurs ont
par la suite cité leurs difficultés actuelles: l’indisponibilité des surfaces
aménagées pour les habitants de Bagré et c’est les agro-businessmans qui s’en
accaparent et ne les exploitent pas totalement. Pendant ce temps, les enfants
des agriculteurs qui n’ont pas la place dans le périmètre aménagé vont à
l’exode. En plus de cela, ils ont des difficultés d’obtention du matériel
agricole et des intrants. Cette année, des semenciers de riz de Bobo-Dioulasso leur
ont fourni de la semence de base pour qu’ils produisent de la semence améliorée
que les mêmes semenciers devraient vendre au Niger. Quand ils ont semé ce
riz, ce fut de la catastrophe car cette semence n’était pas la bonne qualité.
Les agriculteurs de Bagré étaient obligés de relabourer et ressemer une autre
semence et pendant que certains avaient investi en intrant près de 500 000
francs CFA sur ce riz. Ils ont également des problèmes de commercialisation.
Certains ont vendu leur riz depuis janvier et jusqu’à nos jours ils n’ont pas
eu leur argent.
Les agriculteurs de
Bagré ont constaté que depuis que l’État a donné la gestion à la structure
appelé Bagré Pool, leurs difficultés ont commencé ; pour eux la plaine est
restée à Bagré et Pool est resté à Ouagadougou parce que pour eux les décisions
se prennent à Ouagadougou à leur détriment. Les agriculteurs ont souhaité le
rattachement de la plaine aménagée de Bagré à leur ministère de tutelle qui est
le ministère de l’agriculture. La réponse du vice-président du MPP était qu’il
n’est pas venu en tant que ministre mais cette fois-ci en tant que politique,
il leur a dit que pendant qu’il était ministre, il n’a pas possédé un seul petit
hectare en son nom à Bagré. Pour lui, Bagré était aménagée pour la satisfaction
des agriculteurs, il ne pouvait pas être décideur et bénéficiaire en même
temps. C’est cette philosophie que le MPP prône pour les agriculteurs et si les
agriculteurs veulent que cette philosophie reste, il faut qu’ils adhèrent et
votent MPP. Les agriculteurs de Bagré se sont engagés à voter pour le MPP pour
que leur situation change.
La journée nationale
de paysan 2015 s’est déroulée à Dédougou et le thème portait sur « l’agriculture
familiale pour la souveraineté alimentaire ». J’ai participé à l’un
des ateliers sur l’élevage. Après l’introduction de ce thème, une intervention
a attiré mon attention. Il s’agissait de celle d’un cadre du ministère de
l’élevage qui dit que si l’élevage familiale ne marche pas bien, c’est que les
éleveurs sont indisciplinés. Ils n’écoutent pas bien ce que les techniciens
leur dit et même quand ils écoutent ils n’appliquent pas. La mauvaise
organisation des éleveurs a été également citée par un autre intervenant. J’ai
intervenu après eux pour faire une analyse globale de l’élevage.
Pour moi, tous les
pays qui ont pu moderniser l’élevage ont associé l’élevage à l’agriculture et
c’est les deux qui sont en conflit dans le cas du Burkina ; pourquoi cela ?
Certainement nos penseurs n’ont pas bien réfléchi, ils n’ont pas adapté leur
méthode de conseil pour l’intérêt de l’agriculteur et l’éleveur. Pour la
modernisation de l’élevage, le Brésil, la France, le Pays-Bas ont tous
travaillé avec leur recherche à rendre complémentaire l’agriculture et
l’élevage. Et cette complémentarité a fait décoller les agriculteurs. Leurs
chercheurs ont par la suite travaillé à avoir une race productive de bétail
adaptée à leur climat. Or, au Burkina ce n’est toujours pas le cas. À titre
d’exemple, dans la modernisation de notre aviculture, nous n’avons fait
qu’importer les poussins de l’Europe. Ce n’est pas la recherche du Burkina qui
a fait cette trouvaille. Au Brésil, j’ai vu des variétés d’herbes qu’ils ont
importé de l’Afrique et qui est cultivé la bas pour nourrir le bétail. Au
Burkina, les herbes que les animaux aiment sont en train de disparaître parce
qu’elles sont tellement broutées qu’elles ne font plus de graine. Nous sommes aujourd’hui envahis par une herbe qui grandit beaucoup et que les animaux n’aiment pas et c’est elle qui se multiplie pour envahir le pays et cela
n’inquiète pas nos dirigeants de l’élevage.
Quant à la mauvaise organisation, nous sommes à la 18ème journée
du paysan. Si l’on fouillait tous les rapports de ces journées, il a toujours
été question de mauvaise organisation des filières. À quoi auraient servi alors
les journées de paysan ?
Après la journée du
paysan, un débat a été animé par la télévision nationale. Ils appellent ce
débat, controverse. Les invités étaient des producteurs de coton. Après ce
débat, tous les burkinabé conscients ont pu se faire une idée de ce qui minent
l’organisation des filières. J’ai vu quelqu’un qui, après ce débat, s’est posé la
question à savoir quel est le rôle d’accompagnement des
ministères en matière d’organisation? Les États-Unis, sont un grand pays où
l’économie marche bien, mais j’ai eu l’occasion de découvrir que l’application
du droit a permis à la population de mériter chacun ce qui lui revient et en
cas de faute, personne n’est au-dessus de la loi et ce n’est pas l’ancien
ministre de la transition DJIGUÈMDÉ qui va me dire le contraire.
Citoyen
burkinabé
Ouagadougou, le 07 mai 2015
TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa
de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr
(+226) 70 95 34 45
(+226) 78 50 16 25
BURKINA
FASO
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