Le
Burkina Faso a près de 80% de sa population qui est rurale. Ces ruraux ont
comme métiers : l’agriculture, l’élevage, l’artisanat et autres. Ils ont
besoin d’accompagnement de l’Etat pour devenir des professionnels et être de
véritables acteurs économiques. Cet accompagnement de l’Etat ne peut se faire
que si on sait qui fait quoi réellement, dans quelles conditions ? Au
stade actuel, ce ne sont que les producteurs de coton qui sont connus. Leurs surfaces cultivées par an
individuellement sont connues au niveau des groupements de producteurs de coton
(GPC). Ceux qui font les autres cultures ne sont pas du tout répertoriés par
acteur dans les villages et dans les communes. Ce qui rend très difficile leur accompagnement.
On pourrait me dire que c’est dans les structures professionnelles qu’on devrait
savoir qui fait quoi alors que de nos jours, près 50% de ces acteurs ruraux ne sont
pas dans des structures professionnelles. Pour ceux qui sont dans les structures,
rares parmi celles qui se disent professionnelles, sont capables de donner les
surfaces exactes cultivées dans chaque domaine par personne. Les chambres
d’agriculture ont été créées mais à mon avis, leur fonctionnement n’est senti
qu’au niveau régional. Dans les communes, les représentants de ces chambres se
connaissent à peine et ne peuvent donc pas fournir l’état des cultures
emblavées dans leurs localités.
La
décentralisation qui est une bonne initiative doit avoir comme pilier de
développement, les activités qu’exerce la population. Nous sentons un effort de
l’Etat à mettre quelques moyens à la disposition des communes. À mon avis, cela
est une bonne chose mais pour ce qui est du développement de la population,
elle ne peut venir que des activités menées par celle-ci. Nous savons également
que dans chaque village, il y a au moins deux (02) conseillés qui ont
l’obligation de participer aux sessions communales au moins une fois par mois. Nous
savons aussi qu’une commune dont l’économie ne prospère pas ne peut pas faire
véritablement des recettes. Tout cela fait que la commune doit être préoccupée
par son économie. Dans cette dynamique, je proposerais que la commune
réfléchisse à comment recenser ses acteurs afin d’être capable de connaitre la
superficie emblavée, les spéculations (mil, maïs, sésame, arachide, etc.) et la
production réalisée par chaque producteur au cours de chaque campagne agricole.
Pour y arriver, une bonne réflexion dans chaque village peut permettre aux
conseillers de conduire ce travail et par la suite une centralisation pourrait
se faire dans la commune. Et ce travail pour une première fois peut commencer du
mois d’aout à septembre, à cette période, tous les champs sont effectivement
emblavés et on aura beaucoup de chance de ne pas se tromper sur les surfaces. Comme
ça, nous pouvons avoir la chance de prendre en compte tous les acteurs qui
vivent dans un village et savoir ce qu’ils ont produit. Ces vraies statistiques
peuvent non seulement faciliter mais aussi renforcer la structuration
professionnelle et l’accompagnement des différents acteurs, très souvent, des
partenaires ONG ont besoin de ces statistiques mais ils ont du mal à les avoir
par commune et par village. De nos jours, l’esprit de développement doit
également être basé sur les réalités et les potentialités de chaque région. Une
raison de plus pour créer la cohésion du développement dans les villages.
Il
n’y a pas de développement sans innovation. C’est la routine qui bloque souvent
le développement dans nos pays africains. L’habitude face à une innovation, c’est
de dire « on n’a jamais vu cela », « cela va être très difficile
» ou alors « cela va nous coûter trop cher », se
tabler sur la cherté d’une innovation pour ne pas faire face au problème réel,
est synonyme d’une vision et d’une réflexion infécondes. Souvent, sous nos
cieux, une innovation créée même des conflits. Par exemple, quand nous avons à l’époque voulu
créer les GPC, certains partenaires avaient dit qu’on allait « casser le
tissu social » dans les villages. Pourtant au finish, l’histoire nous a
donné raison car cette structuration a facilité l’accompagnement et a boosté la
filière coton. Je crois donc que pour que toutes les filières se développent,
il faut absolument un répertoire de base dans tous les villages qu’on
centralisera dans chaque commune. De toutes les façons, je ne connais aucun
pays qui ait pu faire le développement sans connaitre ses acteurs et la
meilleure façon de connaitre ses acteurs, c’est à partir du village et de la
commune. Mon analyse peut être améliorée mais je crois bien en celle-ci.
En tant que Agriculteur burkinabé
Ouagadougou, le 26 janvier 2017
TRAORE B. François,
Agriculteur Burkinabé
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