La
population burkinabé est majoritairement jeune. Les paysans occupent près de
80% de la population et nous assistons en tant que pères de familles,
impuissamment, à la fuite de cette jeunesse vers les villes du Burkina et vers
d’autres pays. En tant qu’agriculteur, je vais m’intéresser à quelques causes
et conséquences de cet exode rural.
Pour les causes, dans le milieu rural, la limitation du
nombre d’enfants n’est pas bien comprise. Il n’est pas rare de voir une femme
qui fasse 10 enfants ; la moyenne étant 5 enfants/femme selon mon propre
analyse. Dans le milieu rural, la polygamie est également très courante. Un
homme peut se retrouver facilement avec 04 femmes avec plus de 20 enfants. Pour
ne citer que celles-ci qui sont des causes sociales.
En
ce qui concerne les causes éducatives, les initiations ne sont plus au niveau
où elles étaient avant la colonisation. L’école a remplacé dans beaucoup de cas
ces initiations dans l’éducation des enfants. Cette école n’a pas tiré
suffisamment de leçons qu’à la formation à l’initiation. Ce qui fait que les
enfants sont souvent instruits mais pas bien éduqués. Par le fait du nombre élevé
d’enfants qu’une famille peut avoir, souvent tous ses enfants ne vont pas à l’école
sans oublier qu’il y a parfois des orphelins puisque des parents meurent
laisser leurs enfants.
Nous avons l’éducation
coranique qui interne les enfants chez un marabout. Ces enfants sont souvent
près d’une centaine. Ils sont parfois obligés de mendier pour se nourrir et
pour nourrir leur maître. Ce qui fait que les enfants qui sont passés par là
sont en contact directe avec la société. Comme au niveau de l’initiation que
pratiquaient nos ancêtres, il y’a certains faits positifs que nous n’avons pas su
tirer de cette école coranique pour améliorer l’école moderne. En
effet, grâce au mode de vie à l’école coranique, les jeunes se familiarisent aux
bonnes techniques d’approche vers autrui dès leur bas âge, sont initiés à la
combativité etc.
Au
titre de l’éducation par la famille, selon le métier qu’exerce le père ou la
mère, chaque enfant est initié très tôt à ce travail. Ce métier peut être l’agriculture,
l’élevage, la pèche etc. Mais souvent cette initiation au métier se fait avec
une pression inadaptée. Il y’ a 100 ans, on pouvait exercer cette pression sans
qu’un enfant ou un jeune ne décide de quitter la famille. De nos jours, nous
constatons que dès 7 ans, des enfants quittent leur famille. Très souvent,
c’est parce qu’ils ne mangent pas assez. Les divorces dans les foyers polygames
créent également une autre couche d’enfants dans la même famille parce que la maman
n’est plus là.
La
mauvaise gestion et répartition des revenus dans la famille est aussi une des
difficultés qui contraint les jeunes à aller en ville. Pourtant à l’âge de
l’adolescence, l’énergie du jeune est fortement utilisée. Dans certains milieux,
les jeunes se marient très tôt, souvent à moins de 20 ans. Ils se trouvent dans
l’obligation de créer une exploitation agricole. Or il peut se poser un
problème d’équipement agricole ou de terre. Pour toutes ces difficultés qui ne
sont pas exhaustives, il y’a des conséquences.
Parmi
ces conséquences, il y a le fait que l’enfant est souvent malnutrie et mal
formé. De nos jours, la jeunesse a le contact facile avec l’extérieur par le
biais des radios, des télévisions, des cinémas, de l’internet etc. Comme
l’éducation qui lui est donnée n’est pas très bien orientée, le jeune ne
comprend pas pourquoi ceux qu’ils voient à travers ces canaux d’informations sont
bien dotés en matériel et sont heureux, et lui, il ne l’est pas. Cela peut le
pousser à s’approcher de là où il y a les gens qui possèdent les choses qu’il n’a
pas sur place. Pour ceux qui se sont mariés tôt, c’est la femme ou l’homme qui
part laissé les enfants. Très souvent, il n’y a pas a mangé suffisamment pour
ces enfants. Et il arrive que les parents ne reviennent plus.
Nous
avons des familles dans lesquelles tous les bras valides sont partis laissés
les plus petits et les vielles personnes qui ne peuvent pas souvent travailler
pour se nourrir. Le jeune qui est parti, s’il n’a pas eu gain de cause, ne
revient pas parce qu’il connait les difficultés qui l’attendent derrière. Même
pour ceux qui reviennent, souvent ils arrivent trouver que leurs terres sont occupées.
Et cela fait des conflits dans la famille et dans le village. Les causes et les
conséquences de l’exode rural de ces jeunes sont donc nombreuses.
Cela
fait que les jeunes qui constituent la majorité de la population Burkinabè ne
profitent pas suffisamment de leur jeunesse pour travailler et gagner. Cette
situation fait qu’un chef de famille qui a beaucoup de jeunes est plutôt
souvent inquiet parce qu’il ne sait pas si ses enfants ne vont pas partir le
laisser. Le fait que les jeunes se déplacent sans avoir maîtriser une profession,
ils deviennent une charge là où ils vont. Le pays ne profite pas de cette
jeunesse chassée par la pauvreté dans le milieu rural et qui vient remplir les
villes.
De
nos jours, nous avons des gouverneurs, du chef de village au Président du Faso,
des hommes politiques aux intellectuels. Le problème de cette jeunesse doit
nous préoccuper tous. Beaucoup de pays ont trouvé une solution à ce problème.
Je pense que le burkinabè également peut trouver une solution mais en reconnaissant
le problème, en faisant un vrai diagnostique et en cherchant des solutions adaptées.
Ces solutions existent.
Ouagadougou, le 12
janvier 2015
TRAORÉ B. François,
Agriculteur Burkinabé,
Docteur honoris causa
de l’Université de Gembloux,
E-mail: dadilotbf52@yahoo.fr
Skype:dadilotbf52
(+226) 70 95 34
45
(+226) 78 50 16
25
BURKINA FASO
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